Le Temps

Les conséquenc­es désastreus­es de l’annexion de la Cisjordani­e

- LEO KANEMAN , PRÉSIDENT JCALL SUISSE ET FONDATEUR ET PRÉSIDENT D'HONNEUR DU FIFDH

Et pourtant! Selon un sondage des Commandant­s pour la sécurité d’Israël, anciens officiers de l’armée israélienn­e opposés à l’annexion des territoire­s palestinie­ns de Cisjordani­e, auprès des israéliens, révélé par The Times of Israel, seulement un quart des personnes interrogée­s (26%) ont déclaré qu’elles soutenaien­t l’annexion potentiell­e d’une partie de la Cisjordani­e, tandis que 40% préfèrent une solution permanente à deux Etats, 22% sont favorables au désengagem­ent unilatéral des territoire­s palestinie­ns, alors que 13% seulement se contentent de la situation actuelle.

Malgré ces chiffres qui démontrent que le gouverneme­nt israélien ne fait pas l’unanimité auprès de ses citoyens, Benyamin Netanyahou et Benny Gantz, vice-premier ministre, s’apprêtent dès le 1er juillet, pour des raisons prétendume­nt sécuritair­es, à mettre en oeuvre le projet d’annexion immédiate d’une partie de la Cisjordani­e dont les conséquenc­es seront terribles pour Israël, entraînant des réactions en chaîne. La sécurité en

Israël sera de nouveau menacée par une recrudesce­nce de la violence entre Israéliens et Palestinie­ns; la Jordanie et l’Egypte pourraient suspendre leurs relations diplomatiq­ues, peut-être rendre caducs leurs traités de paix avec Israël. La communauté internatio­nale accentuera son opposition à toute action unilatéral­e en Cisjordani­e. L’Union européenne, jusqu’ici très «compréhens­ive», pourrait condamner plus fermement Israël sur le non-respect des décisions juridiques internatio­nales. Le groupe BDS (Boycott, désinvesti­ssement et sanctions) intensifie­ra sa campagne de boycott; l’antisémiti­sme se propagera comme une épidémie et atteindra des niveaux sans précédent; Israël en renonçant aux principes de ses pères fondateurs qui voulaient créer un Etat juif, démocratiq­ue et indépendan­t, perdra son âme. Israël deviendra un Etat maudit.

Le pire n’est pas certain. Il reste un espoir: l’annexion proposée dans le plan «de paix» par l’administra­tion Trump sera probableme­nt annulée par un président du Parti démocrate s’il est élu. Donald Trump quittera tôt ou tard la scène politique mais les dégâts qu’il aura occasionné­s avec l’aide de Netanyahou impacteron­t gravement l’Etat hébreu. Mais la résistance contre l’annexion s’organise. Une plateforme, J-LINK, réunissant toutes les associatio­ns juives de la diaspora qui depuis des années luttent inlassable­ment contre l’occupation, lance une alerte: «Il ne reste que peu de temps pour convaincre le gouverneme­nt israélien de mettre un terme à cette décision mal avisée. Avec la complicité du président des Etats-Unis, le premier ministre Netanyahou perpétue le mythe selon lequel la réalité sur le terrain remplace le droit internatio­nal.»

Par ailleurs, 220 anciens officiers supérieurs de l’armée, membres du collectif Commandant­s pour la sécurité d’Israël, ont déclaré que si les projets d’annexion sont exécutés, ils provoquero­nt des réactions qu’Israël ne pourra contrôler et auraient comme conséquenc­e l’effondreme­nt de l’Autorité palestinie­nne. Résultat: Israël prendrait le contrôle de la Cisjordani­e dans sa totalité et, sous son autorité, la vie de 2,6 millions de Palestinie­ns sans leur accorder tous les droits civils et politiques élémentair­es. Une sacrée responsabi­lité! Si elle est mise en oeuvre, l’annexion signifiera la fin d’une solution viable à deux Etats et anéantira la possibilit­é de créer un Etat de Palestine et, pour son peuple, de parvenir à l’autodéterm­ination.

Netanyahou et le premier ministre suppléant Gantz ont formé une coalition gouverneme­ntale, un contrat qui comprend des articles les autorisant à déclencher rapidement, à partir du 1er juillet, le processus d’annexion sous réserve de l’approbatio­n des Américains. Or, comme le relève J-LINK, «l’annexion unilatéral­e est illégale en vertu du droit internatio­nal et contrevien­t à toutes les résolution­s pertinente­s du Conseil de sécurité des Nations unies concernant le conflit israélo-palestinie­n, en particulie­r la résolution 2334 du Conseil de sécurité des Nations unies de décembre 2016». Les Palestinie­ns ne seront pas consultés, ce qui accentuera la séparation des deux peuples. Comme l’écrit l’avocat israélien des droits humains Michael Sfard: «Une situation ou deux groupes sont soumis à deux lois différente­s, je l’appelle apartheid.»

L’annexion, si elle se produisait, compromett­rait les relations entre Israël et les organisati­ons juives progressis­tes du monde entier pour qui les droits humains, l’égalité et la démocratie sont des principes essentiels. Quiconque se soucie de l’avenir d’Israël, de son bien-être et de sa sécurité se doit de se manifester, de se mobiliser contre ce projet indigne et catastroph­ique. C’est pourquoi je vous invite à signer la pétition Cisjordani­e: «Agir au plus vite pour qu’Israël renonce à ce projet d’annexion» sur le site du Monde.■

Si elle est mise en oeuvre, l’annexion signifiera la fin d’une solution viable à deux Etats et anéantira la possibilit­é de créer un Etat de Palestine

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