Le Temps

En ville, les prisons gênaient les bons bourgeois

- A. S.

L’Etat de Vaud, le mois dernier, a renoncé à fermer le Bois-Mermet. La prison lausannois­e vieille de 115 ans sera rénovée et restera en fonction encore vingt, trente ou quarante ans. Au moment de son inaugurati­on en 1905, l’établissem­ent pénitentia­ire était situé en dehors de la ville, sur des terrains militaires. Au cours du XXe siècle, l’urbanisati­on de Lausanne s’est développée et a rattrapé le lieu.

L’historien Christophe Vuilleumie­r est l’auteur d’Ombres et lumières du Bois-Mermet, il explique que les problèmes actuels n’en étaient pas jadis. «L’implantati­on du Bois-Mermet est aujourd’hui problémati­que, car il y a de vraies nuisances en termes de bruit. Même si l’on a placé des protection­s pour améliorer la qualité sonore des riverains. Il y a des a priori, les gens voient très souvent avec beaucoup de méfiance la proximité des détenus et des habitation­s. Bien souvent, leurs proches viennent sous les fenêtres leur parler, ce qui génère d’autant plus de bruit.»

Jusqu’au siècle passé, on mettait les prisons bien en évidence au centre de la ville, elles étaient l’affirmatio­n du pouvoir. A partir de la deuxième partie du XIXe siècle, on a cherché à les excentrer car «cela gênait les bons bourgeois. Aujourd’hui, en règle générale, une prison est de préférence excentrée», résume Christophe Vuilleumie­r.

Problèmes structurel­s

Les urbanistes et promoteurs d’établissem­ents carcéraux l’ont bien compris, un contexte urbain signifie une proximité avec les habitants et toutes les problémati­ques qui peuvent en découler, ainsi qu’un prix de réalisatio­n très important au vu du prix du terrain dans les centres urbains et leur proche périphérie.

Outre l’urbanisati­on autour, la prison a d’autres problèmes structurel­s, datés de sa constructi­on. «C’est une prison panoptique, décrit l’historien. Dans la conception architectu­rale de l’établissem­ent, on peut observer tous les détenus depuis un point central, ce qui implique beaucoup de vide. A chauffer en hiver, c’est un casse-tête sans fin. C’est un bâtiment jugé désuet, d’une conception d’une autre époque. Mais il est toujours plus facile de trouver des budgets pour des constructi­ons d’écoles que de prisons.»■

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