Le président du Kosovo accusé de crimes de guerre
L’actuel chef de l’Etat kosovar, inculpé par les cours spécialisées de La Haye, était le porte-parole de l’Armée de libération du Kosovo (UÇK). Cette guérilla aurait kidnappé, torturé et assassiné des opposants politiques albanais et tué de nombreux civils serbes ou roms
C’est un coup de théâtre qui secoue le Kosovo et tous les Balkans.
Le président kosovar, Hashim Thaçi, et son bras droit Kadri Veseli sont accusés de «crimes de guerre et crimes contre l’humanité, y compris le meurtre, la disparition forcée, la persécution et la torture».
Meurtre d’une centaine de personnes
L’acte d’accusation publié mercredi après-midi par les cours spécialisées pour les crimes de guerre de La Haye mentionne le meurtre d’une centaine de personnes, «des Albanais du Kosovo, des Serbes, des
Roms, ainsi que des opposants politiques, dont les noms sont connus par l’accusation». L’acte stipule que les deux accusés ont mené une campagne de diffamation contre le tribunal, «montrant ainsi qu’ils font passer leurs intérêts privés avant ceux des victimes, le respect de l’Etat de droit et les intérêts du peuple entier du Kosovo».
La création des cours spécialisées est la conséquence du retentissant rapport réalisé en 2010 par le député suisse Dick Marty pour le Conseil de l’Europe, qui avait révélé les suspicions de crimes pesant sur les dirigeants de l’ancienne guérilla de l’Armée de libération du Kosovo (UÇK), dont Hashim Thaçi était le porte-parole. Durant la guerre contre la Serbie, la guérilla aurait kidnappé, torturé et assassiné des opposants politiques albanais. Elle aurait également tué de nombreux civils serbes ou roms, dont certains auraient alimenté un trafic d’organes.
Cinq ans après leur création, les cours ont entendu des centaines de suspects, mais n’avaient encore délivré aucun acte d’accusation. Elles ont choisi de frapper très haut. Hashim Thaçi préside depuis 2016 la République du Kosovo, tandis que Kadri Veseli, chef du Parti démocratique du Kosovo, est l’ancien chef des services secrets de la guérilla.
Hashim Thaçi devait se rendre samedi à Washington pour une rencontre avec son homologue serbe Aleksandar Vucic, négociée par Richard Grenell, l’émissaire spécial du président Trump pour le Kosovo et présentée comme une étape essentielle dans la conclusion d’un «accord final» avec la Serbie. Le maintien de la rencontre est désormais incertain, même si, peu avant 19h, Richard Grenell a annoncé sur Twitter qu’elle aurait bien lieu mais que le Kosovo serait représenté par son premier ministre, Avdullah Hoti. Si Hashim Thaçi choisit de démissionner de sa charge, cela entraînera automatiquement la convocation de nouvelles élections législatives au Kosovo. Le scénario d’un accord rapide avec la Serbie est en tout cas bien compromis.
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