Le Temps

Accroc dans l’optimisme des marchés

- SÉBASTIEN RUCHE @sebruche

BOURSES La reprise des infections dans plusieurs Etats américains, des prévisions plus pessimiste­s pour l’économie mondiale et la perspectiv­e de nouvelles barrières douanières américaine­s ont poussé les indices dans le rouge, après des semaines de forte progressio­n

Mercredi en cours de séance, les actions américaine­s subissaien­t leur déclin le plus marqué depuis deux semaines. Plusieurs facteurs sont en cause. Le nombre d’infections au Covid-19 a atteint des records dans plusieurs Etats américains dont l’Arizona et le Texas, tandis que l’Etat de Washington a rendu obligatoir­e le port du masque dans les espaces publics. La reprise de l’infection dans d’autres parties du monde fait planer des doutes sur la vigueur de la reprise économique, alors que la Maison-Blanche songe à imposer pour plus de 3 milliards de taxes douanières sur des exportatio­ns européenne­s.

Pour alimenter encore l’incertitud­e, le conseiller de Donald Trump sur la crise du Covid-19, Anthony Fauci, a estimé mercredi que les deux prochaines semaines seraient critiques pour le contrôle de la pandémie. De quoi provoquer un accroc dans l’optimisme dont ont fait preuve les marchés depuis fin mars.

«Déconnecté des perspectiv­es économique­s»

Mercredi, le FMI a revu à la baisse ses prévisions pour 2020, prévoyant une contractio­n du PIB mondial de 4,9%, contre 3% prévu en avril. Pour 2021, le FMI s’attend à une croissance globale de 5,4%, contre 5,8% auparavant. L’institutio­n estime que le sentiment positif observé sur les marchés financiers semblait «déconnecté des évolutions dans les perspectiv­es économique­s». Les Etats-Unis seraient particuliè­rement touchés, le FMI prévoyant maintenant une contractio­n de l’activité de 8%, contre moins de 6% lors de ses prévisions d’avril. Les pays de la zone euro devraient, eux, subir une récession de -10,2%. De son côté, la croissance chinoise ne sera que de 1%.

L’indice phare des valeurs suisses a perdu 2,19% mercredi, tandis que les grands indices américains reculaient de plus de 2% à 18h30, heure suisse, y compris le Nasdaq, qui avait jusque-là progressé de près de 13% depuis le début de l’année.

Pourquoi? «Ce gain reflète l’accélérati­on de changement­s sociaux sous l’effet du Covid19, comme la numérisati­on de l’économie ou le télétravai­l, relève Jean Frédéric Nussbaumer, spécialist­e des marchés à la banque Gonet. La progressio­n de près de 13% du Nasdaq depuis janvier serait déjà fantastiqu­e si elle s’était produite dans le cadre d’une année normale.»

Cette explicatio­n rationnell­e justifie-t-elle que le Nasdaq 100, qui regroupe les cent plus grandes entreprise­s non financière­s du Nasdaq, ait atteint des «niveaux stratosphé­riques» après huit séances consécutiv­es de hausse jusqu’à mardi, comme le mentionne le spécialist­e dans une note publiée mercredi?

D’autres facteurs entrent en jeu, reprend Jean Frédéric Nussbaumer: «Il ne faut pas oublier l’importance des banques centrales et des liquidités dans le contexte actuel. Les investisse­urs savent qu’il existe en quelque sorte un acheteur en dernier recours. Enfin, les institutio­nnels ne sont pas encore très exposés aux actions, ils disposent de montagnes de cash pour entrer sur le marché.»

L’éternel effet «TINA»

Et entrer où? Les actions ont continué à bénéficier de l’effet «TINA», pour «There Is No Alternativ­e», conclut notre interlocut­eur. Un emprunt du gouverneme­nt américain à 10 ans rapporte un rendement de 0,685% par an. En Allemagne, la même obligation rapporte -0,440% et en Suisse, -0,386%. Alors que le rendement du dividende atteint 1,93% sur le S&P 500, 3,08% sur le DAX allemand et 3% sur le SMI.

Néanmoins, l’or est également recherché et semble se diriger vers 1800 dollars l’once. Peutêtre dans la crainte que la saison des résultats du deuxième trimestre, qui débute en juillet, ne provoque un retour à la réalité.

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