LIBÉRER L’IMAGINATION
L’écologiste britannique Rob Hopkins signe un plaidoyer pour lutter contre le défaitisme en politique. Changer le monde? C’est possible, explique-t-il. Voici comment.
L’écologiste britannique Rob Hopkins livre un plaidoyer pour l’imagination à l’énergie contagieuse
Au sortir de la crise du coronavirus, c’est déjà devenu un cliché d’imaginer «le monde d’après». Les philosophes, à quelques exceptions près (dont l’Américain John Dewey), n’ont jamais tenu en très haute estime la faculté d’imaginer en tant que force politique créatrice. L’imagination a toujours été suspectée de créer des illusions, des fantasmes, des utopies idéalistes – rien de bien sérieux, donc. Les activistes, eux, n’ont pas le même point de vue: pour eux, l’imagination est capable de façonner l’avenir, parce qu’elle permet de voir les choses autrement.
AVENIRS POSSIBLES
C’est ce credo que défend Rob Hopkins, l’un des chefs de file des activistes écologiques anglo-saxons. Son livre Et si…? a paru en anglais en 2019, avant la pandémie, mais celle-ci lui donne aujourd’hui un écho tout particulier. Car le point de départ du plaidoyer pour l’imagination de Hopkins, c’est le catastrophisme ambiant et le flot de nouvelles anxiogènes dont on nous abreuve en permanence sur le climat, les inégalités, l’extinction des espèces… La pandémie n’y figure pas, mais nous y pensons tous. Sur fond de ce diagnostic désarmant, l’auteur veut réarmer l’imagination, à la maison, à l’école, dans nos vies collectives, partout; car l’imagination est puissante, capable d’induire des changements bien plus importants qu’on… l’imagine.
Sur un ton léger, flirtant par moments avec la tonalité du développement personnel, Hopkins pose pourtant la question politique très sérieuse du «Et si…?». C’est la question politique par excellence, celle qui ouvre aux avenirs possibles plutôt que de se laisser accabler par les pesanteurs du présent. Qu’il s’agisse de mobiliser l’imagination dans les assemblées citoyennes, de favoriser son développement dans les écoles ou de l’alimenter dans nos actes sociaux quotidiens, c’est elle qui sera capable de nous faire voir la réalité sous un jour nouveau – et de la transformer.
Traversé par une énergie contagieuse, fourmillant de centaines d’exemples, le plaidoyer de Hopkins est un vaccin contre la pandémie du défaitisme ronchon. Car à chaque page de son livre, on se dit que la question «Et si…?» est la soeur jumelle de la question «Pourquoi pas?»