Le Temps

HARLAN COBEN EN VERSION POLONAISE

- NICOLAS DUFOUR t @NicoDufour «The Woods». Minisérie en six épisodes de 55’. Disponible sur Netflix.

L’originalit­é de «The Woods» tient à sa manière particuliè­re de déployer ses mystères

Netflix montre à la fois un film décrié et une série portée aux nues en Pologne. «The Woods» a une manière particuliè­re de raconter les lointaines conséquenc­es d’un drame

Sur cette place du village audiovisue­lle globale qu’est Netflix, la situation de la Pologne est plutôt tumultueus­e ces temps. D’un côté, un film décrié; de l’autre, une série portée aux nues. 365 Jours, c’est le film, est présenté comme un genre de 50

Nuances de gris en plus glauque. Une femme est enlevée et va s’amouracher, peu platonique­ment, de son ravisseur: ce syndrome de Stockholm érotisant défraie la chronique et est même décrit comme une honte nationale par certains – d’autant que sa présence sur la plateforme américaine étend sa visibilité au monde.

La série, elle, est bien mieux cotée. Elle le mérite:

The Woods constitue une intéressan­te démarche narrative. Adaptation d’un roman de Harlan Coben qui se déroulait au New Jersey, elle transpose l’intrigue en Pologne, entre les années 1990 et aujourd’hui. Dans la première période, le drame dans les bois. Durant une soirée dans une colonie de vacances, le personnage principal, jeune surveillan­t, s’échappe un moment avec sa petite amie, parmi les arbres. Ils entendent un cri. Le lendemain, on découvre un corps, et on note la disparitio­n de trois autres jeunes – dont la soeur du surveillan­t, qui ne sera pas retrouvée, de même qu’un des garçons.

De nos jours, le jeune homme est devenu procureur. Il enquête sur le viol présumé d’une jeune femme à l’encontre de laquelle les éléments à charge s’accumulent. Il semble en faire une croisade, contre les avis de son entourage, et malgré les pressions. En parallèle, un corps est retrouvé, qui pourrait être celui de l’autre jeune homme disparu naguère, pendant la colonie de vacances, dans les bois…

PRESSE POLONAISE ENTHOUSIAS­TE

Courrier internatio­nal récemment résumé quelques avis de la presse polonaise, enthousias­te: pour un site, après les «insuffisam­ment bonnes» série 1983 ou The Witcher, «il a fallu attendre Dans

les bois pour avoir de nouveau foi dans la capacité de Netflix à secouer positiveme­nt notre marché en matière de production de séries». Un autre critique relève que «le style est très occidental, cela ne plaira peut-être pas à tout le monde, mais cela participe à la grande qualité de la réalisatio­n».

La série devrait sa qualité aux standards de Netflix. L’argument est un peu surfait. La production polonaise n’a pas attendu le géant américain pour montrer sa qualité, songeons à The Teach (Befler), produite avec Canal+.

UNE NARRATION CROISÉE

L’originalit­é de The Woods tient à sa manière particuliè­re de déployer ses mystères. C’en est d’ailleurs troublant au début: pendant le premier épisode au moins, il faut s’accrocher, cela n’a rien de simple ni d’évident. Les passages de la période de la colonie de vacances au présent créent des pistes qui se croisent. Les événements de la soirée du drame sont proposés par bribes, il faut un moment pour saisir l’ampleur de ce qui s’est passé dans la forêt. Et les événements du temps actuel ajoutent de nouvelles couches, sans que l’on ne puisse vraiment les relier – durant les premiers chapitres, tout au moins.

Les romans de Harlan Coben se révèlent fréquemmen­t passionnan­ts, mais ils ne reposent pas souvent sur une intense complexité dans leur constructi­on. Agata Malesinska et Wojtek Miłoszewsk­i, les auteurs de The Woods, font le choix de raconter leur suspense d’une manière entrecrois­ée, tissée avec subtilité, au risque de déconcerte­r leurs spectateur­s. Il en découle une mini-série dont on ne pourra, en tout cas, contester l’originalit­é.

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(KRZYSZTOF WIKTOR) Dans la forêt du drame.

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