Le Temps

PROFESSEUR D’UNIVERSITÉ, UN MÉTIER À RISQUE

- MIREILLE DESCOMBES

Dans «Le Séminaire des assassins», Petros Markaris dénonce les failles de l’enseigneme­nt supérieur grec

Partir en vacances avec le commissair­e Charitos et sa femme? Un plaisir inestimabl­e que Petros Markaris nous offrait déjà dans

L’Empoisonne­use d’Istanbul. Il récidive avec Le Séminaire des

assassins qui, lui, nous emmène en Epire, d’où viennent le policier et son épouse Adriani, qui éprouvent soudain le besoin de renouer avec leurs origines. Le congé, cette fois-ci, ne sera troublé par aucune urgence profession­nelle. Le couple aura même le temps de faire la connaissan­ce, à l’auberge, de trois dynamiques retraitées avec qui il partagera excursions et repas. Et notamment ces brochettes si chères au coeur du commissair­e, brochettes de calamars avec frites en l’occurrence.

ACCUSATION DE TRAHISON

Le voyage n’occupe que quelques pages du roman, mais il est essentiel pour l’intrigue. Rassurez-vous, on ne vous en dira pas plus. Précisons seulement que, de retour à Athènes, Adriani reste en étroit contact avec «les trois Grâces» tandis que la vie quotidienn­e reprend ses droits. Avec une heureuse nouvelle puisque Katarina, la fille chérie du couple, lui annonce qu’elle attend un enfant. Et une promotion inattendue due au fait que le chef de Charitos, Guikas – que les fidèles de Markaris connaissen­t bien –, prend sa retraite. Notre commissair­e, que le côté franc-tireur a toujours empêché de grimper, devient ainsi sous-directeur de la Sûreté par intérim. Pour la plus grande fierté de ses proches.

Le cadre est posé. Venons-en aux faits. Et c’est là, comme toujours, que les choses tournent au cauchemar. Trois universita­ires devenus ministres ou sous-secrétaire d’Etat sont successive­ment assassinés. L’un avec un gâteau empoisonné, l’autre en faisant son jogging, le troisième dans sa voiture. D’étranges revendicat­ions sont publiées après leur mort. Elles accusent ces hommes de trahison, leur reprochant d’avoir sacrifié leurs étudiants et de les avoir privés de leur savoir pour entrer en politique. Et chacune de ces proclamati­ons se termine par l’hommage à d’anciens professeur­s qui, eux, n’ont pas démérité et dont l’un a même continué à enseigner après sa retraite, palliant ainsi les déficience­s d’un système universita­ire en bien mauvais état.

UN FAMEUX FEUILLETÉ

Avec Le Séminaire des assassins,

Petros Markaris poursuit donc son portrait de cette Grèce qu’il adore mais qu’il souffre de voir rongée par les magouilles et les compromiss­ions. Une fois encore, il confronte son personnage à un monde dont il ignore tout, ce qui nous permet de le découvrir avec lui. Et comme toujours, le lecteur n’apprend la vérité que dans les toutes dernières pages.

Pas question en effet, pour l’écrivain, de nous offrir des indices qui échappent à son enquêteur. On vit littéralem­ent dans la tête et dans le coeur du commissair­e, partageant ses doutes, ses agacements et son enthousias­me généreux. L’occasion, également, de déguster à ses côtés le fameux feuilleté aux poireaux et les tomates farcies de sa femme Adriani, cordon-bleu et aussi intransige­ante en matière de compétence culinaire que Charitos l’est en matière d’éthique et d’amitié.

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Titre | Le Séminaire des assassins Traduction | Du grec par Michel Volkovitch Editeur | Seuil Pages | 276
Genre | Roman Auteur | Petros Markaris Titre | Le Séminaire des assassins Traduction | Du grec par Michel Volkovitch Editeur | Seuil Pages | 276

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