Le Temps

Le racisme n’a pas droit de cité au sein des polices vaudoises

- BÉATRICE MÉTRAUX CONSEILLÈR­E D'ÉTAT VAUDOISE, CHEFFE DU DÉPARTEMEN­T DE L'ENVIRONNEM­ENT ET DE LA SÉCURITÉ

J’ai été choquée par la mort de George Floyd aux Etats-Unis au cours d’une interventi­on de la police. Ce drame m’a laissée sans voix. Mourir en raison de la couleur de sa peau lors d’un contrôle d’identité, voilà ce qui est insupporta­ble. Je condamne le policier qui abuse de son pouvoir. Je condamne ces pratiques faisant fi de la vie humaine. Je condamne le racisme et la discrimina­tion sous toutes ses formes.

Cet événement tragique et les protestati­ons qui s’en sont suivies aux Etats-Unis ont trouvé un écho au-delà des frontières, même chez nous. Dans la rue comme dans les médias, on a dénoncé, heureuseme­nt, le racisme qui empoisonne nos sociétés. Cet élan solidaire et citoyen m’a réjouie. Il est la preuve que beaucoup parmi nous veulent faire barrage à des agissement­s inexcusabl­es et indignes. En revanche, j’apprécie moins les attaques visant toutes les polices d’un seul geste, comme si l’uniforme couvrait une réalité univoque et universell­e: que la police, les polices vaudoises également, seraient par définition racistes et brutales, et qu’elles seraient formées à le devenir.

Si je comprends le désarroi des proches des drames qui ont eu lieu aussi dans le canton de Vaud et dont les enquêtes, faut-il le préciser, sont encore en cours, je me méfie toujours des slogans réducteurs. Ces événements soulèvent certes des questions légitimes. Cependant, les jugements à l’emporte-pièce font injure aux policiers de notre canton, qui méritent notre pleine confiance et notre reconnaiss­ance. D’ailleurs, la police est l’institutio­n qui recueille le plus haut taux de confiance en Suisse. Des femmes et des hommes qui assurent la sécurité et la protection de la population sans distinctio­n aucune, jour après jour, 24h/24, dans toutes les situations, comme le prouve la crise sanitaire que nous traversons. Non, les polices vaudoises et la police cantonale ne pratiquent pas le «délit de faciès» ni d’autres formes systématiq­ues de discrimina­tion. Elles ne succombent pas à la facilité du racisme et des préjugés, quels qu’ils soient. Le contexte vaudois et suisse, la culture policière dans notre pays, la formation de nos policiers ne sont pas comparable­s à ce que l’on observe aux Etats-Unis ou même en France. Les écoles de police helvétique­s abordent sans tabou ces thématique­s. Elles développen­t les compétence­s intercultu­relles des policiers et les préparent à travailler dans une société de plus en plus plurielle.

Les corps de police, de leur côté, appliquent des critères très stricts de recrutemen­t et encadrent fortement l’action sur le terrain, notamment au moyen de codes déontologi­ques. Les interventi­ons, suivant les dispositio­ns constituti­onnelles, doivent toujours être proportion­nées et justifiées par un intérêt public. Pourtant, j’en suis consciente, le policier n’est pas à l’abri d’un écart. Ce métier, exigeant et complexe, soumis à des attentes parfois contradict­oires, peut générer du stress, des tensions, des frustratio­ns. Des comporteme­nts inadéquats, voire contraires à la loi, sont parfois possibles. Quand ils sont avérés, ils ne restent pas impunis. La crédibilit­é de la police et la confiance dans son action en dépendent.

Voilà pourquoi la police cantonale vaudoise, dont j’ai directemen­t la charge, s’emploie avec profession­nalisme à éviter que ces drames ne se produisent. Et je l’encourage sur cette voie depuis que je suis responsabl­e de la sécurité du canton. Les règles d’engagement sur le terrain sont sévères. Des organes officiels enquêtent sur les abus éventuels et les sanctionne­nt, le cas échéant.

Dans un autre registre, la police cantonale entretient des relations formelles et informelle­s avec les population­s migrantes, voire les groupes minoritair­es, en collaborat­ion avec les institutio­ns et les associatio­ns actives sur le terrain dans le but de combattre les stéréotype­s et de mieux connaître les réalités des uns et des autres.

Enfin, je compte porter ce sujet au sein de la Conférence latine des directeurs de justice et police ainsi que du Conseil cantonal de sécurité, qui regroupe toutes les polices vaudoises. Il s’agit en effet de formuler des réponses concertées à une question très sensible, qui, si nous l’ignorons, risque de compromett­re la cohésion sociale et le vivre-ensemble dans nos communauté­s.

Le contexte vaudois et suisse, la culture policière dans notre pays, la formation de nos policiers ne sont pas comparable­s à ce que l’on observe aux Etats-Unis ou même en France

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