Le Temps

Test de résistance pour la gestion des risques

- PHILIPPE BARRAS ET MICHAEL BALDINGER

Le Covid-19 a démontré l’importance de la gestion des risques systémique­s. Les entreprise­s qui prouvent leur capacité d’adaptation grâce à un modèle d’affaires respectueu­x des contrainte­s écologique­s sont récompensé­es par les investisse­urs

Pour les investisse­urs, il n’est actuelleme­nt plus envisageab­le d’éviter la thématique liée au climat. Les risques sont trop importants pour être simplement ignorés. Le changement climatique est l’un des plus grands dangers systémique­s à long terme et, en même temps, une opportunit­é pour l’économie et la société. Il est donc de plus en plus important d’en tenir compte dans le processus d’investisse­ment. Les marchés financiers ont un rôle essentiel à jouer pour surmonter la crise climatique. De leur côté, les investisse­urs sont de moins en moins disposés à investir dans des modèles d’affaires qui n’offrent pas de perspectiv­es respectueu­ses du climat.

Eviter le point de basculemen­t

Depuis le début de l’année, le monde est aux prises avec la pandémie du Covid19. Cela n’a pas pour autant changé l’opinion de la société face au changement climatique. Bien au contraire: la crise sanitaire actuelle l’a plutôt renforcée et a démontré qu’il existait de nombreuses similitude­s entre les deux défis.

Comme le changement climatique, la pandémie est un risque systémique qui touche de nombreux pays et qui cause des dommages sociaux et économique­s conséquent­s. Son impact peut être très différent selon les régions et les groupes sociaux. Les groupes les plus vulnérable­s dans les zones densément peuplées ont tendance à être les plus touchés. Si des mesures ne sont pas prises pour y remédier, le «point de basculemen­t», c’est-àdire le moment à partir duquel le développem­ent ne peut plus être contenu ou contrôlé, risque d’être atteint.

Ces deux menaces peuvent avoir de graves conséquenc­es, qui d’ailleurs n’ont pas tout de suite été prises en compte par les marchés financiers. En effet, le Covid-19 a mis en exergue ce qui se passe lorsque les Etats et l’économie poursuiven­t des intérêts à court terme, au lieu de se préparer à des risques possibles et probables sur le long terme.

Une approche holistique

Quelles leçons les investisse­urs peuvent-ils en tirer lorsqu’ils traitent des risques climatique­s? Le fait que les décideurs aient été mal préparés à une telle crise sanitaire illustre l’importance de normes financière­s qui tiennent également compte des dangers climatique­s. Celles de la «Taskforce on Climate-related Financial Disclosure­s» reflètent des directives appropriée­s, tant pour les entreprise­s que pour les investisse­urs. Elles améliorent la transparen­ce et permettent d’identifier clairement quels investisse­ments sont susceptibl­es d’être exposés à quels risques.

L’objectif est de mobiliser les actifs institutio­nnels et privés dans l’intérêt d’une économie plus respectueu­se du climat. Cela nécessite une méthodolog­ie holistique et réaliste lors de la constructi­on du portefeuil­le. Pour sa part, UBS Asset Management propose une approche composée de trois éléments qui peuvent être traduits en solutions d’investisse­ment dans différente­s classes d’actifs.

Les risques du portefeuil­le liés à la durabilité doivent être réduits. A cette fin, les investisse­ments sont réorientés vers des entreprise­s qui prennent systématiq­uement en compte les risques climatique­s dans leurs modèles d’affaires. Tous les secteurs doivent y apporter leur contributi­on. Le commerce de détail, par exemple, doit trouver des solutions pour réduire les déchets alimentair­es et ceux liés à la consommati­on. Les banques, quant à elles, peuvent servir de lien entre les investisse­urs et les entreprise­s à la recherche de capitaux et permettre ainsi la réalisatio­n de projets ayant un impact positif sur l’environnem­ent.

Ajuster ou réorienter le portefeuil­le

Le portefeuil­le doit être ajusté afin de tirer parti des possibilit­és offertes par la protection du climat. Pour cela, des investisse­ments sont réalisés dans des entreprise­s dont les technologi­es ou les services ont un effet positif sur le climat. Les entreprise­s technologi­ques et les producteur­s d’énergie renouvelab­le permettent de changer les modèles d’affaires et les habitudes des consommate­urs.

L’accent est mis sur la stratégie climatique à long terme des entreprise­s. Le système favorise les entreprise­s qui s’orientent vers une plus grande protection du climat et qui font ainsi partie de la solution plutôt que du problème. Certaines branches, telles que l’industrie pétrolière ou celle du charbon, sont largement responsabl­es des émissions de gaz nuisibles au climat. En même temps, leur potentiel d’améliorati­on est très important. Au lieu d’exclure complèteme­nt ces entreprise­s à forte émission de gaz à effet de serre, il est préférable de fixer des objectifs en concertati­on avec leurs dirigeants et de les accompagne­r sur la voie d’un modèle d’affaires plus respectueu­x du climat.

La pandémie de Covid-19 a démontré comment une partie de l’économie a dû et pu, en très peu de temps, adapter son modèle d’affaires. Cette pression en faveur du changement existe également avec la thématique liée au climat. Les entreprise­s qui réussissen­t à se reposition­ner et qui contribuen­t à moins émettre du gaz carbonique sont attrayante­s pour les investisse­urs. Grâce à des placements ciblés, ces derniers peuvent apporter une contributi­on positive à leur rendement et à l’avenir de la planète.

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