Dana Gavanski, timidité balayée et fierté affichée
Une voix de gorge, douce et apaisante, au service de compositions tout en subtilité: voilà la grande qualité de Dana Gavanski. Un outil comme une bénédiction? C’est en fait tout le contraire quand elle nous avoue: «J’étais d’une timidité maladive à l’enfance. Je voulais chanter pour les autres, mais je ne savais pas comment. Et j’étais incapable d’entendre la moindre critique ni même un seul encouragement. J’ai toujours oscillé entre l’excitation et la terreur au fil des ans. Jusqu’à ce que je prenne des cours à l’âge de 20 ans, ce qui m’a permis de ne plus avoir peur des erreurs ni des jugements. Mais je me souviens d’une leçon où j’ai fondu en larmes parce que je venais de comprendre que j’avais moi-même construit ces peurs permanentes. Il a fallu que je travaille sérieusement sur ces sentiments, et sur d’autres aussi, puisque tout est lié…»
Un long travail d’apprentissage payant à l’écoute de ces dix chansons fruits de séparations, déménagements, pertes et reconstruction. Canadienne élevée à la culture serbe, elle s’est offert quelques voyages sur la terre de ses ancêtres pour développer sa connaissance des kafanas, ces auberges où se mêlent chants traditionnels, fumeurs et excès d’alcool: «Je ne connaissais rien des chants traditionnels serbes, qui parfois se rapprochent du folk anglais ou des classiques folks des Appalaches. Il y a une grande euphorie dans leurs chansons, même pour les plus tristes.»
Elle vient également de nous offrir une belle surprise cet été: cinq reprises de titres historiques qui ont compté pour elles, avec notamment le délicieux I Talk to the Wind de King Crimson. Un exercice assez souvent catastrophique, dans le meilleur des cas inutile, mais qu’elle a su sublimer grâce à sa grande sensibilité et la conscience de plus en plus forte de sa singularité. «J’en suis bizarrement très fière, un sentiment très rare chez moi.» La confiance est enfin venue. Une grande compositrice et une fabuleuse interprète viennent de naître.
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