Double acquisition pour la Fondation Renaissance
PRIVATE EQUITY L’institution lausannoise investit les capitaux d’une quarantaine de caisses de pension dans des PME suisses non cotées en bourse. Dont Matthey Décolletages, à La Chaux-de-Fonds, et Canplast, à Villars-Sainte-Croix
La Fondation Renaissance fait du private equity, mais un peu différemment. Financée par une quarantaine de caisses de pension suisses, Renaissance ne revend pas forcément après cinq ou sept ans les sociétés dans lesquelles elle a investi, comme c’est la pratique sur ce marché. Depuis 2019, la fondation de placement lausannoise peut conserver ses participations sans limite de temps et en retirer des dividendes, qui sont reversés à ses actionnaires. C’est ce qui est prévu pour ses dernières acquisitions, Matthey Décolletages, active dans l’horlogerie haut de gamme à La Chaux-de-Fonds, et Canplast à Villars-Sainte-Croix.
Chez Matthey Décolletages, le fils du fondateur cherchait à transmettre la société d’une vingtaine de personnes lancée en 1952. Mais le patron voulait éviter que le fabricant de mouvements pour l’horlogerie (moins de 10 millions de chiffre d’affaires) ne change de mains fréquemment à l’avenir. C’est sur ce point que la Fondation Renaissance a pu se distinguer et conclure la transaction, analyse son directeur associé Christian Waldvogel: «La présence de caisses de pension suisses donne une image de long terme qu’apprécient les PME. A travers notre fonds Evergreen, nous pouvons rester investis dans des sociétés sans limite de temps, avec un modèle de distribution de dividende. Le directeur de Matthey Décolletages reste actionnaire et devient président du conseil d’administration.» La direction de l’entreprise est confiée à deux cadres, qui ont également investi, aux mêmes conditions que Renaissance.
Ni philanthropique ni d’intérêt public
Ni philanthropique ni d’intérêt public, Renaissance est une fondation de placement créée en 1997. C’est-à-dire qu’elle gère des capitaux qui lui sont confiés par des caisses de pension uniquement. Pour ces dernières, rester investies sur le long terme évite de devoir placer à des taux négatifs d’importantes liquidités générées par la revente d’une société. Comptant trois sociétés en portefeuille, dont Matthey Décolletages, cette approche
Evergreen «a été plus rapidement adoptée par des investisseurs alémaniques, majoritaires dans ce fonds, que par les Romands», précise Christian Waldvogel, qui a fait carrière dans l’investissement, les semi-conducteurs et les télécoms.
L’an dernier, le fonds a généré une performance de 13%, dont 5,3% ont été distribués en dividendes. Le véhicule vise une performance de 10 à 11% par an. Renaissance gère un autre fonds, fermé celui-là, qui compte sept positions et a généré 7% l’an dernier, une performance dans la moyenne. La fondation annoncera jeudi l’acquisition de Canplast, active dans le traitement des eaux à Villars-SainteCroix (VD), avec 80 employés et un chiffre d’affaires supérieur à 30 millions.
La fondation, qui investit pratiquement sans endettement, a contribué à financer plus de 40 PME suisses depuis son lancement, la plupart du temps des entités réalisant de 20 à 80 millions de chiffre d’affaires. Fin 2018, Renaissance a ainsi repris le fribourgeois Condis, pour 55 millions de francs, là aussi dans le cadre d’un management buy-out.
Sur un segment très recherché par les investisseurs, «nous ne participons jamais aux enchères souvent organisées pour des PME en quête de repreneurs, poursuit notre interlocuteur. Car ces mécanismes impliquent des transactions rapides qui empêchent d’analyser les sociétés et les prix sont souvent excessifs.» Le fonds Evergreen de Renaissance a investi la moitié des 125 millions qu’il a levés. Un deuxième tour de financement est en cours, l’objectif à terme étant d’atteindre 300 à 350 millions de francs pour une vingtaine de sociétés en portefeuille.
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