Le syndic de Lausanne en tête des ventes
En campagne pour les élections communales, le socialiste Grégoire Junod signe un manifeste politique, «Etat d’urgence». Fait surprenant, l’ouvrage se classe parmi les meilleures ventes chez Payot
Il n’est pas rare de voir un conseiller d’Etat ou un municipal en campagne sortir un livre, il est plus rare de le voir se positionner en tête des ventes. C’est le cas d’Etat d’urgence du syndic de Lausanne Grégoire Junod, publié aux Editons Favre il y a quelques semaines et occupant d’abord la deuxième place des meilleures ventes chez Payot. «Il est aujourd’hui positionné en quatrième», atteste Pascal Vandenberghe, patron des librairies vert foncé.
Certains plaisantent en imaginant que le Parti socialiste a imposé l’ouvrage en lecture obligatoire à ses partisans mais, au-delà de la blague, Pascal Vandenberghe imagine qu’en effet «sa première clientèle doit être les adhérents au PS», et espère qu’au-delà du parti les Lausannois sont curieux de connaître un peu mieux le syndic de leur ville.
Lausanne compte 140000 habitants, les Editions Favre ont prévu un premier tirage à environ 1200 exemplaires. «La configuration actuelle, avec les librairies fermées, crée une situation de quasi-monopole de cet ouvrage pour Payot en ligne et il émerge de manière forte. Mais si les rayons étaient ouverts, il serait noyé dans le reste», explique Pascal Vandenberghe.
«Contribuer au débat»
Grégoire Junod soulève dans son ouvrage les difficultés des socialistes partout en Europe, la question climatique et la relation à la croissance. «En 2019, la gauche, écrit-il, dans son ensemble, n’a jamais été aussi forte, mais le Parti socialiste réalise le pire score de son histoire. Le socialisme est en crise: d’une part les enjeux climatiques lui posent des défis bien plus considérables qu’il ne le pense; d’autre part, le virage social-libéral pris par une grande partie des sociaux-démocrates européens à partir des années 1990, et dont la Suisse a aussi ressenti le contrecoup, lui a parfois fait oublier le sens de ses engagements.»
Le syndic de Lausanne analyse les défis du monde post-covid et emprunte cette phrase à l’administration Obama: «Il ne faut pas gâcher une crise.» Il faut investir dans des projets qui font sens, relancer le cercle vertueux grâce aux initiatives locales, voir des opportunités dans la baisse du trafic aérien et le développement de secteurs industriels. Le livre est préfacé par la maire socialiste de Paris, Anne Hidalgo. «J’étais contente qu’elle accepte, car elle s’est beaucoup impliquée dans la défense des villes et de ce qu’elles ont en commun à partager», souffle Grégoire Junod.
Le syndic ne considère pas son ouvrage comme un instrument de campagne, mais voulait tout de même qu’il sorte avant les élections, «afin de contribuer au débat». En l’écrivant, à quel genre de lecteur pensait-il? «A des gens proches de la vie politique, et quelques curieux qui s’intéressent à leur ville, impliqués ou non à gauche.» Au terme de sa première législature de syndic – il a succédé en 2016 au Vert Daniel Brélaz –, Grégoire Junod admet avoir pris confiance en lui, s’être étoffé dans ses fonctions.
«Particulièrement unie»
Cela se ressent, lui qui maniait à merveille la langue de bois il y a quelques années s’est affirmé et se distingue aujourd’hui dans les débats politiques. Il a surmonté les difficultés, soutenu sa femme, la sénatrice Géraldine Savary, lors de sa démission – «ce fut une grosse épreuve familiale et personnelle» – et mené une «municipalité particulièrement unie» durant la crise du covid.
Aux Editions Favre, on est ravi de retrouver l’ouvrage en top des ventes de Payot «aux côtés du Dico romand, que l’on a sorti un mois avant: il y a toujours une part d’inconnu quant au succès d’un livre d’un politique local», livre l’éditrice Sylviane Deriaz. «Là, c’est le syndic de Lausanne, il est connu. Il l’a écrit avant de nous le proposer, nous étions partants. La meilleure vente d’un ouvrage politique que l’on a connue était La Suite des idées, cosigné par Pascal Couchepin et Philippe Nantermod.» ■
«Là, c’est le syndic de Lausanne, il est connu. Il l’a écrit avant de nous le proposer, nous étions partants» SYLVIANE DERIAZ, ÉDITRICE CHEZ FAVRE