Objectif: faire passer la loi covid
Sous pression, le gouvernement décidera mercredi s’il autorise la réouverture des terrasses. Il veillera à créer un climat favorable pour que la loi Covid-19, sur laquelle repose le système d’aides financières, soit confirmée dans les urnes
PANDÉMIE Prolonger les aides financières dont plus de 100000 entreprises et plus d’un million de personnes ont bénéficié et dépendent toujours, tel est l’objectif du Conseil fédéral et des cantons en appellant à voter oui à la loi covid soumise au peuple le 13 juin. Même si ce projet n’a aucune influence sur la levée des restrictions, le gouvernement doit créer un climat favorable à son approbation dans les urnes. Sous pression, il décidera mercredi s’il autorise la réouverture des terrasses, comme le demandent les cantons et les villes.
Parce qu’elle est combattue par voie référendaire, la loi Covid-19 est soumise au verdict populaire le 13 juin. Elle constitue la base des soutiens financiers mis à disposition des personnes et entreprises ayant dû interrompre ou réduire leurs activités professionnelles à cause de la pandémie. Elle permet aussi au Conseil fédéral de prendre en charge le coût des tests. En revanche, elle n’a aucune influence sur la levée des restrictions mises en place par le gouvernement. «Ces restrictions s’appuient sur la loi sur les épidémies, pas sur la loi covid», a souligné lundi le ministre de la Santé, Alain Berset.
Flanqués du président et du vice-président de la Conférence des gouvernements cantonaux (CdC), le président de la Confédération, Guy Parmelin, et Alain Berset sont entrés
«La politique de lockdown a été un échec. Elle n’apporte aucune solution aux problèmes et, au contraire, les accentue»
FABIO REGAZZI, PRÉSIDENT DE L’UNION SUISSE DES ARTS ET MÉTIERS
en scène lundi pour défendre la loi Covid-19. Même si elle n’a aucun lien formel avec les interdictions et suspensions d’activités décidées par le Conseil fédéral, son sort peut néanmoins être influencé par le calendrier de la levée de ces restrictions. L’UDC, qui ne cesse d’exiger la réouverture immédiate des restaurants, lieux culturels et sportifs, a établi un lien entre les deux. Le 27 mars, en assemblée des délégués, le parti a choisi de laisser la liberté de vote après avoir soupesé les éléments positifs et négatifs de la loi Covid-19. Ce jour-là, le conseiller national bernois Lars Guggisberg a souligné que la «politique du lockdown» était un argument en défaveur de la loi. «Un non à la loi Covid-19 est la réaction logique de tous ceux qui disent que le Conseil fédéral a mal utilisé ses compétences et a justifié de manière lacunaire les atteintes aux libertés qu’il a imposées», a-t-il résumé.
Le Conseil fédéral craint-il que la population, visiblement lasse de voir les restaurants, théâtres, cinémas et centres sportifs fermés, se laisse tenter par un non dans les urnes le 13 juin, si les restrictions ne sont pas levées?
«Nous sommes tous très fatigués»
«Nous sommes tous très fatigués. Mais notre population comprend ce qui se passe et les gens font la différence entre le combat contre la pandémie et les mesures de soutien destinées aux branches affectées par les restrictions. Or, ces mesures de soutien tomberaient à l’eau si la loi Covid-19 était rejetée», répond-il en soulignant que les prochaines décisions du Conseil fédéral ne seront pas influencées par cette échéance.
Le prochain rendez-vous, c’est mercredi. «Le Conseil fédéral fera une nouvelle appréciation en mettant un maximum d’éléments sur la table», annonce Guy Parmelin, qui dit «comprendre l’impatience et la colère». Or, cette impatience est montée d’un cran ces derniers jours. L’UDC a mis en discussion trois propositions au sein de la Commission de l’économie et des redevances du Conseil national (CER-N), réunie lundi et mardi. Toutes trois demandent la réouverture rapide des établissements, avec des calendriers plus ou moins contraignants. L’UDC espère convaincre la CER-N d’ajouter sa voix aux pressions exercées par les organisations économiques, impatientes de tourner le dos aux confinements, quels qu’ils soient.
Ces pressions sont bien réelles. Lundi, l’Union suisse des arts et métiers (USAM) a une nouvelle fois demandé un changement de stratégie et un plan de sortie de crise. Pour son président, Fabio Regazzi (Centre/TI), lui-même membre de la CER-N, «la politique de lockdown a été un échec. Elle n’apporte aucune solution aux problèmes et, au contraire, les accentue.» Il demande au Conseil fédéral de confier la gestion de la crise à une délégation interne et à un «état-major dans lequel tous les départements, offices fédéraux, cantons et partenaires sociaux» seraient représentés. Le directeur de l’USAM, HansUlrich Bigler, reproche au Conseil fédéral une politique «unanimement focalisée sur la santé», dominée par l’Office fédéral de la santé publique (OFSP) au détriment du Secrétariat d’Etat à l’économie (Seco), «totalement défaillant» dans la gestion de la crise.
Ouvrir les terrasses pour diminuer les déchets
Que va décider le Conseil fédéral mercredi? Alors que les chiffres demeurent élevés, sa marge de manoeuvre reste étroite. Le président de la Conférence des directeurs cantonaux de la santé (CDS), le conseiller d’Etat bâlois Lukas Engelberger, a cependant ouvert une brèche. Il a déclaré dimanche à la RTS qu’on ne prendrait «pas de grands risques» à rouvrir les terrasses des restaurants, en limitant le nombre de convives à quatre par table et en respectant les mesures sanitaires. La période lui paraît plus propice qu’il y a un mois. L’Union des villes suisses (UVS) lui a emboîté le pas. Elle a plaidé lundi pour l’ouverture des terrasses flanquée de plans de protection. Cette mesure permettrait de résoudre un autre problème: l’amoncellement de déchets provenant de la restauration à l’emporter.
Pour le reste, on ne s’attend guère à voir le Conseil fédéral aller plus loin que ce qu’il avait mis en consultation à mi-mars, avant d’y renoncer face à la remontée du nombre de cas. Il s’agissait alors d’autoriser les manifestations culturelles et sportives en limitant le nombre de participants aussi bien pour les rendez-vous professionnels qu’amateurs. ■