Le Temps

Les entreprene­urs genevois sont sensibles au développem­ent durable mais le pratiquent peu

- DAVID HAEBERLI @David_Haeberli

Une étude inédite commandée par la Chambre de commerce et d’industrie permet de comprendre la sensibilit­é des entreprise­s envers la durabilité. L’institutio­n lance une charte et se veut prescriptr­ice dans ces domaines

Les entreprene­urs genevois sont sensibles aux thématique­s de durabilité et de responsabi­lité sociale, mais seule une fraction d’entre eux ont déjà pris des mesures concrètes dans ces domaines. Voilà la conclusion d’une étude inédite qu’a commandée la Chambre de commerce et d’industrie de Genève (CCIG) et dévoilée lundi.

«Quelle croissance pour Genève? Le point de vue des entreprise­s» a été confiée à Giovanni Ferro Luzzi et Sylvain Weber, de l’Institut de recherche appliquée en économie et gestion. Les deux chercheurs se sont entourés d’un comité de dix membres, principale­ment des universita­ires.

Le travail s’est déroulé en deux phases. La première a été lancée «dans le monde d’avant», a résumé Vincent Subilia, directeur de la CCIG. Elle a consisté à étudier les effets de la croissance à Genève sur plusieurs décennies, dans sa complexité. L’accélérati­on économique dans les années 80 a par exemple permis un accroissem­ent spectacula­ire du niveau de vie par rapport à celui des années 50. Plus riches, les Genevois se sont également déplacés de manière plus intense, générant une pollution supérieure. En 1980, chaque passager à Cointrin consommait 55 litres de kérosène en moyenne, contre 75 en 2020.

Différents degrés de sensibilit­é

La seconde phase a été menée entre décembre 2020 et mars 2021 sous la forme d’un questionna­ire envoyé aux 2400 membres de la CCIG, auquel 262 ont répondu. Un échantillo­n qui satisfait les chercheurs. Cette partie, à visée microécono­mique, renseigne sur les entreprene­urs contempora­ins et leur degré de sensibilit­é aux questions de croissance, de développem­ent durable et de responsabi­lité sociale de l’entreprise. Ces concepts, assure Sylvain Weber, jouissent d’un vaste soutien parmi les sondés. Toutefois, seuls 13% d’entre eux ont fait un bilan carbone de leur société

et 30% ont pris des mesures concrètes pour atteindre l’égalité salariale. La majorité des sondés n’a rien entrepris. Ils jugent l’impact de telles mesures trop peu important. «Il faut renforcer les politiques publiques pour inciter par exemple à faire des bilans carbone, conclut le chercheur. Cela créera un cercle vertueux. Ceux qui l’ont fait sont satisfaits.»

Dans le détail, les entreprene­urs abordent différemme­nt la question de la croissance. Pour 57% des sondés, c’est via le chiffre d’affaires qu’ils l’envisagent alors que pour 24%, c’est via les emplois et pour 13% via les salaires. Parmi les entreprise­s ayant pris des dispositio­ns énergétiqu­es, dans 60% des cas, ces efforts sont ciblés sur l’électricit­é contre 43% sur le chauffage. Or, a expliqué le chercheur, l’électricit­é est un poste de dépense modeste et pollue peu par rapport au chauffage. «Les mesures, a-t-il regretté, ne ciblent pas les bons domaines.»

Nouvelle charte

Le rapport, a espéré Vincent Subilia, doit aider la CCIG à être prescriptr­ice. A l’occasion de sa 156e assemblée générale de mardi, elle va étreindre une charte afin d’aider ses membres à atteindre les objectifs de développem­ent durable. Un nouveau service va être inauguré qui épaulera les entreprise­s décidées à faire un diagnostic durabilité.

«Il faut renforcer les politiques publiques pour inciter par exemple à faire des bilans carbone»

SYLVAIN WEBER, CHERCHEUR DE L’INSTITUT DE RECHERCHE APPLIQUÉE EN ÉCONOMIE ET GESTION

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