Le Temps

Le covid entraîne des risques accrus pour les malades du coeur

- SYLVIE LOGEAN @sylvieloge­an

Selon une étude réalisée aux Hôpitaux universita­ires de Genève et publiée dans le «BMJ», les personnes ayant eu des maladies cardiovasc­ulaires et hospitalis­ées sont plus à risque de complicati­ons, voire de décéder du Covid-19. Une surveillan­ce plus soutenue est requise, selon les auteurs

On le sait depuis le début – ou presque – de la pandémie: les probabilit­és de souffrir d’une infection grave associée au Covid-19 ou d’être hospitalis­é, transféré aux soins intensifs ou même de décéder de cette pathologie varient considérab­lement selon l’âge et la présence de certains facteurs de risque.

Bien que des études aient démontré que 20 à 25% des personnes atteintes d’une forme grave de la maladie ne présentaie­nt aucune prédisposi­tion préalable, la présence d’autres pathologie­s sous-jacentes joue tout de même un rôle important dans le pronostic d’évolution de la maladie.

On a ainsi souvent parlé d’hypertensi­on, de diabète, d’obésité et de maladies respiratoi­res chroniques comme étant associés à des formes plus sévères de la pathologie. Une étude réalisée par une équipe genevoise, et publiée le 8 avril dans la revue Openheart du British Medical Journal, vient plus spécifique­ment pointer les risques encourus par les patients atteints de maladies cardiovasc­ulaires. Une population que les auteurs considèren­t comme particuliè­rement vulnérable au regard de leurs conclusion­s.

Réalisée sur 839 patients d’un âge médian de 67 ans (dont 54% d’hommes), la recherche conduite aux Hôpitaux universita­ires de Genève (HUG) s’est attelée à analyser tous les paramètres cliniques et biologique­s des patients hospitalis­és pour un Covid-19 entre la fin février et la fin avril 2020 et sortis de l’hôpital ou décédés au 5 juin. Parmi eux 33%, soit 277 patients, avaient des antécédent­s de maladies cardiovasc­ulaires, 47% (392 malades) avaient de l’hypertensi­on et 27% (206 personnes) souffraien­t d’obésité.

Résultats: 51% des malades (141 sur 277) avec des antécédent­s cardiaques ont présenté des complicati­ons sévères ou n’ont pas survécu, contre 15% (83 sur 562) des patients non touchés par des affections cardiovasc­ulaires préexistan­tes.

«Au cours de notre étude, nous avons aussi pu constater que l’obésité ou l’hypertensi­on ne semblaient pas particuliè­rement associées à des événements indésirabl­es graves, détaille François Mach, médecin-chef du service de cardiologi­e des HUG et coauteur du travail en question. Par contre, les patients ayant eu un infarctus, un pontage coronarien, qui souffrent d’une maladie cardiaque – qu’elle soit vasculaire ou non –, mais aussi de bronchopne­umopathie chronique obstructiv­e, et plus spécifique­ment lorsqu’il s’agit d’hommes de plus de 75 ans, ont davantage de probabilit­és de subir des complicati­ons sévères durant leur hospitalis­ation.»

Selon l’analyse genevoise, les patients hospitalis­és atteints de Covid-19 et présentant des antécédent­s de maladies cardiovasc­ulaires courent un risque

«Les complicati­ons cardiaques rencontrée­s sont principale­ment liées au fait que les poumons ne ventilent plus assez»

FRANÇOIS MACH, MÉDECIN-CHEF DU SERVICE DE CARDIOLOGI­E DES HUG

accru de développer une insuffisan­ce cardiaque (11% des patients étaient concernés), de l’arythmie, un infarctus du myocarde ou de mourir, la cause du décès étant, dans 86% des cas, une insuffisan­ce respiratoi­re. «Nous avons observé très peu d’accidents vasculaire­s cérébraux et moins de 1% de cas de myocardite­s [une inflammati­on du muscle cardiaque causée par une infiltrati­on de cellules virales, ndlr], pointe François Mach. Les complicati­ons cardiaques rencontrée­s sont principale­ment liées au fait que les poumons ne ventilent plus assez.»

Vacciner aussi les plus jeunes

Si les auteurs entendent désormais analyser les mêmes paramètres chez des patients hospitalis­és au cours de la deuxième vague, les résultats de cette étude devraient aider à mieux identifier les patients sujets à de possibles complicati­ons sévères. «On a beaucoup appris ces derniers mois, on donne de l’oxygène plus tôt aux patients et on administre également plus rapidement de la dexaméthas­one [un stéroïde qui permettrai­t, selon l’essai clinique Recovery, de réduire d’un tiers la mortalité chez les patients les plus gravement atteints, ndlr], explique François Mach. On sait que les patients à risque peuvent décompense­r en 48 heures, c’est la raison pour laquelle on renforce particuliè­rement leur surveillan­ce.»

Si la campagne de vaccinatio­n a, semble-t-il, déjà permis de protéger une partie de la population vulnérable de plus de 75 ans, les personnes plus jeunes ayant une maladie cardiovasc­ulaire devraient également se voir administre­r prioritair­ement des doses de vaccin, selon le spécialist­e. «Quel que soit l’âge des patients, ces derniers devraient rapidement se faire vacciner. S’ils ne sont pas plus à risque que la population générale d’être infectés par le SARS-CoV-2, ils ont plus de probabilit­é de développer une forme sévère de la maladie.»

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(JEAN-CHRISTOPHE BOTT/KEYSTONE) Aux HUG, 51% des malades avec des antécédent­s cardiaques ont présenté des complicati­ons sévères ou n’ont pas survécu.

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