Le béton recyclé peine encore à s’imposer en Suisse
Pour les associations faîtières du secteur, la mise en place d’une économie durable dans la construction demande une action politique plus forte
A deux mois de la votation sur la révision de la loi sur le CO2, quatre associations faîtières du secteur de la construction appellent à l'instauration de conditions-cadres adaptées à la mise en place d'une économie circulaire dans le secteur. Elles ont organisé mardi une conférence de presse pour exposer leurs propositions pour faire face aux défis posés par les objectifs climatiques de la Confédération.
Cet appel intervient alors qu'une sous-commission de la Commission de l'environnement, de l'aménagement du territoire et de l'énergie du Conseil national travaille sur cette thématique depuis l'automne 2020. Elle doit rendre public le résultat de son travail au mois de mai. Mais les faîtières du secteur craignent qu'il ne se traduise par des réglementations jugées contre-productives.
Selon les représentants du secteur, les objectifs pour réduire les émissions de CO2 des habitations entraîneront une production accrue de déchets dans le secteur de la construction.
Aujourd'hui, la construction représente 84% de la production de déchets en Suisse, soit 74 millions de tonnes, principalement des déchets d'excavation et de démolition. «Nous recyclons déjà environ 70% des matériaux de démolition», souligne Gian-Luca Lardi, président central de la Société suisse des entrepreneurs (SSE). Seulement, dans le même temps, l'utilisation du béton recyclé n'est que de 20% dans les chantiers du fait d'une certaine réticence à l'usage de ce matériau.
Une demande d’exemplarité des pouvoirs publics
Pour les faîtières, les pouvoirs publics, qui représentent près de la moitié du carnet de commandes, pourraient jouer un rôle d'accélérateur en demandant l'utilisation de matériaux recyclés. Cette sous-utilisation de matériaux de construction recyclés a des conséquences concrètes. «Ils constituent des stocks importants qui s'accumulent sur les sites de recyclage», souligne Kurt Morgan, président de l'association Recyclage matériaux construction Suisse.
Au-delà de montrer l'exemple, les faîtières demandent aussi aux pouvoirs publics de faire sauter les freins légaux qui limitent selon elles la mise en place d'une économie circulaire efficace dans le secteur de la construction. Un des exemples abordés, l'impossibilité d'utiliser certains déchets voués à l'incinération comme combustibles pour la production de ciment qui demande d'atteindre de très hautes températures.
«Nous pourrions économiser 400 000 tonnes de CO2 supplémentaires chaque année en utilisant les déchets qui ne se prêtent pas au recyclage classique comme carburants alternatifs», affirme Gerhard Pfister, président de l'Association suisse de l'industrie du ciment. Une manière d'augmenter la part de carburants alternatifs utilisée dans cette industrie jugée très polluante, qui s'élève actuellement à 70%. ■