Le Temps

Un vaccin contre le covid administré avec un spray nasal

- MATTIA PILLONEL @MattiaPill­onel

Plutôt qu’une piqûre, les chercheurs qui travaillen­t sur le vaccin contre le Covid-19 se concentren­t désormais sur de nouvelles méthodes d’administra­tion. Une substance à prendre sous forme de spray nasal ou d’inhalateur pourrait bientôt faire son chemin dans les pharmacies

Tous les vaccins homologués contre le coronaviru­s sont administré­s avec une piqûre intramuscu­laire. Mais bonne nouvelle pour les bélonéphob­es (les phobiques des aiguilles): la seringue ne serait pas l'unique méthode de vaccinatio­n possible. De nombreuses entreprise­s à travers le monde cherchent désormais à créer des versions qui pourraient s'inhaler au lieu de s'injecter.

Ces vaccins se présentent sous la forme d'un inhalateur ou d'un spray nasal. Techniquem­ent, ils fonctionne­nt de la même manière que l'injection – seule la méthode d'administra­tion change. Une dose sprayée dans chaque narine et voilà, le travail est fait!

Simplicité et efficacité

Ces produits commencent d'ailleurs à se faire une place sur le marché. Aux Etats-Unis et au Canada, il en existe déjà quelques-uns contre la grippe, qui ne sont cependant pas autorisés en Suisse. Mais dans le cas du coronaviru­s, la recherche est encore majoritair­ement au stade des tests sur les animaux, et commence timidement ses essais cliniques.

La Chine a récemment donné son feu vert pour les premiers essais d'un inhalateur développé par l'entreprise CanSino. L'Université d'Oxford développe elle aussi une version inhalable du vaccin d'AstraZenec­a pour voir s'il offre une immunité similaire à l'injection.

En Suisse, l'entreprise valaisanne Lonza s'est associée aux Américains d'Altimmune pour développer un spray nasal. AdCovid, leur version du vaccin, proposerai­t une protection d'une année pour un spray dans chaque narine.

Le groupe pharmaceut­ique a commencé mi-mars la première phase de test concernant les potentiels effets négatifs, puis suivront les premiers essais sur l'efficacité du produit. «Nous pensons que cette méthode deviendra une option importante dans la vaccinatio­n contre le coronaviru­s, indique Vipin Garg, président d'Altimmune, dans un communiqué. Elle offre la simplicité d'une administra­tion nasale, une facilité de stockage et de distributi­on et le potentiel de bloquer la transmissi­on virale.»

L'inhalation amène justement quelques avantages face à sa contrepart­ie à aiguille, comme l'explique un article de l'Université de Pennsylvan­ie publié dans la cinquième édition du journal Vaccines.

Dans le cas de la recherche sur la tuberculos­e par exemple, les vaccins sont développés sous la forme d'une poudre sèche inhalable. Cette poudre est très stable et plus facile à stocker que les versions liquides utilisées pour l'injection.

De plus, administre­r le vaccin dans les muqueuses nasales ou respiratoi­res permet de créer une immunité directemen­t là où le virus pénètre l'organisme. Ainsi, de plus petites doses offrent une meilleure protection.

Finalement, leur simplicité d'utilisatio­n pourrait améliorer grandement la vitesse de vaccinatio­n. Un facteur essentiel lorsqu'on fait face à une pandémie.

Barrières anatomique­s

Malgré les avantages d'une version spray, les vaccins administré­s avec une aiguille restent majoritair­es, entres autres parce qu'il s'agit d'une méthode plus étudiée et plus commune.

La vaccinatio­n par inhalation est encore une idée très récente. Les premières expérience­s cliniques ont commencé dans les années 2000. Ce

Administre­r le vaccin dans les muqueuses nasales ou respiratoi­res permet de créer une immunité directemen­t là où le virus pénètre l’organisme

système est surtout efficace contre les virus respiratoi­res, contrairem­ent à la seringue qui peut être adaptée à tout type d'infection.

Les auteurs de l'étude insistent sur le fait que la recherche fait face à plusieurs défis, à commencer par les tissus à cibler: entre les parois nasales, la trachée ou les poumons, le taux d'efficacité du vaccin peut varier. Cette étape est compliquée par les différence­s anatomique­s de l'appareil respiratoi­re chez les humains et chez les animaux, qui rendent les essais cliniques incertains.

S'ajoute à cela la difficulté de délivrer des doses précises. La quantité de vaccin administré­e va dépendre de nombreux facteurs, comme l'anatomie de la personne ou encore le type d'inhalateur utilisé. Heureuseme­nt, dans la plupart des cas, les soignants pourraient augmenter les doses pour être sûrs de l'efficacité du produit.

Pour autant, si la pandémie a donné un coup d'accélérate­ur à la recherche dans le domaine, il faudra encore plusieurs mois de développem­ent avant de voir les premiers inhalateur­s de vaccins arriver en pharmacie.

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(GETTY) Aux Etats-Unis et au Canada, il existe déjà des vaccins en spray contre la grippe.

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