Le Temps

Bernard Madoff, l’escroc de tous les superlatif­s

Responsabl­e de la plus grande escroqueri­e pyramidale de l’histoire, le financier américain est mort à 82 ans, mercredi. Il purgeait les 150 années de prison dont il avait écopé en 2009. A Genève, les victimes avaient été nombreuses

- MATHILDE FARINE, ZURICH, ET SÉBASTIEN RUCHE @MathildeFa­rine @sebruche

Il était l’auteur de la plus grande escroqueri­e financière de l’histoire, à hauteur de plusieurs dizaines de milliards de dollars. Ses victimes? Pas moins de 37000 personnes réparties dans

136 pays, y compris la Suisse. Sa technique? La fraude pyramidale «à la Ponzi», qui consistait à piocher dans les dépôts de ses nouveaux clients pour rétribuer ou rembourser des investisse­urs plus anciens. Le financier américain Bernard

Madoff est mort à 82 ans dans le pénitencie­r de Caroline du Nord où il purgeait une peine de 150 ans de prison.

C’était l’un des plus grands escrocs du monde de la finance. Objet de plusieurs livres, films et séries, Bernard Madoff est mort mercredi en prison à l’âge de 82 ans. Pendant des décennies, le financier new-yorkais avait fait croire à ses investisse­urs qu’ils plaçaient leur argent dans des fonds sûrs et au rendement stable.

On estime à 37000 personnes réparties dans 136 pays, y compris en Suisse, le nombre de victimes de celui qui était surnommé «le magicien de Wall Street» – avant de devenir «le monstre» et de voir toute la communauté financière se retourner contre lui. Sa fraude avait atteint un total de 65 milliards de dollars (près de 60 milliards de francs). L’ex-financier purgeait une peine de 150 ans de prison dans un pénitencie­r de Caroline du Nord, où on le disait plutôt populaire parmi les détenus, qui lui demandaien­t des conseils financiers.

Dénoncé par ses fils

L’affaire avait éclaté fin 2008, alors que «Bernie» avouait à ses deux fils que son activité de gestion d’actifs était un «grand mensonge», une fraude pyramidale – jeu de l’avion ou système de Ponzi – par laquelle il rémunérait ses anciens investisse­urs avec l’argent reçu par les nouveaux. Les fonds n’étaient, en fait, pour la plupart jamais investis. Ses fils le dénoncent aux autorités américaine­s et il est arrêté le 11 décembre.

Condamné par un tribunal new-yorkais en juin 2009, après avoir plaidé coupable, il avait demandé «pardon à [ses] victimes» et affirmé regretter laisser «un héritage de honte à ma famille. Je suis responsabl­e d’un grand nombre de souffrance­s et de douleurs». Les clients de Madoff venaient de tous les horizons. Banques de toute la planète, célébrités, Prix Nobel, mais également des associatio­ns caritative­s et beaucoup de membres de la communauté juive de New York.

Des dégâts à Genève

La fraude du siècle a également fait des dégâts à Genève, où de nombreuses banques et gérants de fortune avaient confié les avoirs de leurs clients à Madoff. Apprenant sa mort, l’un d’eux nous a déclaré ce mercredi: «J’aurais préféré qu’il purge sa peine en intégralit­é, chaque jour des 150 ans.» Au moins deux procès pénaux liés à l’affaire Madoff se sont tenus à Genève, dont l’un s’était conclu par l’acquitteme­nt de l’ancien patron de la société de gestion Optimal Investment Services, en décembre 2015. Quelques dossiers ont fini par être classés, dont celui d’Aurelia Finance, une société investie via le fonds Hermès.

Certains établissem­ents avaient dédommagé leurs clients. Parmi ceux-ci, UBP avait assorti ce remboursem­ent d’une condition: que les clients concernés restent à la banque pendant une période définie – ce qu’une large majorité d’entre eux avaient fait, selon nos informatio­ns. UBP avait été l’un des premiers établissem­ents à trouver un accord avec le liquidateu­r de Madoff, en versant 500 millions de dollars dès décembre 2010.

Le volet genevois de la fraude Madoff n’est pas totalement terminé. Les fonds de certaines victimes sont toujours bloqués par des banques, dans l’attente de la résolution des dossiers concernant les fonds Fairfield et Luxalpha, ce dernier étant hébergé par UBS.

Né en 1938 à New York, Madoff a été courtier, investisse­ur et surtout l’un des premiers à introduire les écrans d’ordinateur pour afficher les cours de bourse eta exécuter des transactio­ns. Il avait été le président de la bourse des valeurs technologi­ques, le Nasdaq, entre 1990 et 1993, et même un «meuble» de Wall Street pendant des décennies, selon le Wall Street Journal, qui le décrit comme un «arnaqueur brillant», qui «respirait la respectabi­lité», avec un air «aristocrat­e», tout en sachant comment donner l’impression à ses victimes qu’elles entraient dans un club exclusif. En 1960, il avait créé sa propre société, qui deviendra Bernard L. Madoff Investment Securities. Son frère y était directeur et responsabl­e de la compliance, et avait écopé de 10 ans de prison. Il y a un an, l’avocat de Bernard Madoff avait demandé que son client soit remis en liberté, en raison d’une maladie en phase terminale.

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(TIMOTHY A. CLARY/AFP) Bernard Madoff en 2009 à New York. Environ 37 000 personnes ont été victimes de son escroqueri­e financière.

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