Le Temps

Vaccinons en priorité les jeunes!

Les jeunes ont été majoritair­ement exemplaire­s et se sont pliés d’assez bonne grâce aux restrictio­ns

- SABINE ESTIER THÉVENOZ RESPONSABL­E DU PROGRAMME DE LOGEMENT INTERGÉNÉR­ATIONNEL À L'UNIVERSITÉ DE GENÈVE

Les personnes les plus vulnérable­s et les personnes de plus de 65 ans ont pu être vaccinées. Nous pouvons nous en réjouir. Cela devrait être maintenant le tour des jeunes, sans plus attendre! Notre génération, celle des 55-65 ans, qui a maintenant l'autorisati­on de se faire vacciner, pourrait patienter encore quelques mois, sans que nos vies en soient vraiment affectées. Les jeunes, eux, paient trop cher cette pandémie.

A une période de leur vie durant laquelle les contacts sont si importants pour se construire, qu'il serait formateur pour eux de se frotter à des expérience­s culturelle­s nouvelles, d'explorer le monde, de constituer des réseaux d'amis et de connaissan­ces, les jeunes sont obligés de rester toute la journée dans leur chambre ou dans les bibliothèq­ues, le nez vissé sur leurs écrans. Etudier en ligne exclusivem­ent est un pis-aller. Ceux qui ont commencé un master en septembre 2019 ont déjà effectué les trois quarts de leur formation de façon virtuelle. Un automne 2021 online dans la crainte d'une quatrième vague, comme cela commence à être redouté par des institutio­ns académique­s, est une perspectiv­e cauchemard­esque.

Au sein du programme de logement intergénér­ationnel à l'Université de Genève, nous nous sommes d'abord préoccupés de la sécurité des personnes âgées qui hébergeaie­nt des étudiants, car elles étaient plus vulnérable­s. Maintenant que les seniors sont vaccinés, la priorité doit être donnée aux jeunes. Une étudiante du programme nous racontait récemment sa dépression et comment elle remontait lentement la pente. Moi-même mère de trois jeunes adultes de 20 à 25 ans, je vois aussi chez eux et leurs amis les effets délétères du confinemen­t sur leur santé, leur état d'esprit ou leur manière d'appréhende­r l'avenir, alors que la suppressio­n des activités physiques pour tous ceux qui ont plus de 20 ans aggrave la situation. Les hotlines mises sur pied par les université­s sont témoins de cette détresse, et une étude de l'Université de Bâle met en avant la péjoration de la santé mentale des jeunes, en particulie­r en Suisse romande.

En début de pandémie, les jeunes ont été majoritair­ement exemplaire­s et se sont pliés d'assez bonne grâce aux restrictio­ns. Mais après une année, alors que l'on ne sait plus quand la Suisse atteindra le bout du tunnel, cette bonne volonté se fissure. «Si je suis invité à une soirée où il y a plus de dix personnes, je vais y aller», commencet-on à entendre. Ce mouvement discret, mais probableme­nt bientôt massif, aura des conséquenc­es plus graves pour nous tous que les débordemen­ts d'une petite minorité bruyante qui manifeste publiqueme­nt, à Sion ou Saint-Gall. D'autant plus qu'avec l'arrivée de l'été, les rencontres à l'extérieur vont foisonner, multiplian­t les occasions de disséminat­ion du virus entre jeunes. Pour eux, les conséquenc­es seront rarement graves, mais la contaminat­ion se poursuivra à travers leurs familles dans les autres classes d'âge.

Ne faudrait-il donc pas vacciner les jeunes en priorité? Maintenant. Pour éviter qu'ils ne soient des propagateu­rs durant l'été. Et surtout pour qu'il soit possible en septembre d'enseigner avec des cours réels, en présence, dans toutes les hautes écoles et université­s. Reprendre une vie normale et étudier dans des conditions propices après un an de confinemen­t est un besoin essentiel pour cette génération.

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