Le Temps

Le SPAC le plus étrange de l’histoire

- SÉBASTIEN RUCHE @Sebruche

Est-ce que vous investirie­z dans une entreprise valorisée à 32,6 milliards de dollars (30 milliards de francs) mais qui ne génère aucun chiffre d’affaires, ne prévoit pas d’en avoir cette année et dont trois dirigeants ont récemment démissionn­é? Peut-être que oui, à la limite, si cette société est active dans les nouvelles technologi­es et qu’elle détient un produit révolution­naire sur un marché en croissance exponentie­lle. Mais si son activité consiste à faire en sorte que des factures d’hôpital soient payées, le pari paraît beaucoup plus risqué.

C’est pourtant dans une entreprise ayant précisémen­t ces caractéris­tiques qu’un SPAC s’apprête à investir. Les spécial purpose acquisitio­n companies sont des coquilles vides cotées en bourse dont le seul objectif consiste à acquérir une entreprise. Ici, le bien nommé Lionheart Acquisitio­n Corp – le SPAC au coeur de lion, en français – a trouvé un accord avec MSP Recovery, l’entreprise qui valait (peut-être) 32,6 milliards.

Le modèle d’affaires de MSP consiste à retrouver les responsabl­es d’accidents automobile­s, par exemple, et à leur faire payer (ou à leur assurance) les frais occasionné­s (notamment d’hospitalis­ation des victimes de l’accident). MSP conserve une partie de l’argent, en reverse une partie à ses avocats et une autre portion à l’assurance publique qui a payé pour l’hospitalis­ation. Cette acquisitio­n par un SPAC serait la deuxième plus importante de l’année, souligne Bloomberg.

L’opération est encore plus étrange lorsqu’on voit qu’en réalité, MSP lèvera 230 millions sur la base de sa valorisati­on à 32,6 milliards. Deux éléments sont frappants: MSP paiera 70 millions en commission­s et les actionnair­es du SPAC mettront la main sur seulement 0,7% de MSP. Autre élément troublant, une étude d’avocats possédée par le patron de MSP et son responsabl­e juridique recevra 20% des sommes récupérées par l’entreprise. Soit davantage que ce que MSP gardera pour elle… Finalement, il n’y avait probableme­nt qu’un SPAC pour accepter de telles conditions.

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