Le Temps

Nouveau séjour à Genève pour le président camerounai­s

- RICHARD ÉTIENNE @rietienne

Paul Biya, malade, viendrait se faire soigner en Suisse. L’homme fort de l’Etat d’Afrique centrale est un habitué du canton, où ses très nombreuses visites luxueuses suscitent la colère de l’opposition

Paul Biya est de retour à Genève, pour ce qui pourrait être le dernier de ses très nombreux voyages dans le canton. Le président du Cameroun, 89 ans et plus vieux président en exercice au monde, a atterri samedi soir à Cointrin, de Yaoundé, à bord d’un Boeing 767 de luxe surnommé «Sky Lady».

Les visites récurrente­s du chef de cet Etat d’Afrique centrale sont controvers­ées parce qu’il y mènerait un train de vie particuliè­rement luxueux et cher aux dépens du peuple camerounai­s, qui vit largement sous le seuil de pauvreté. L’opposition estime que le président dilapide ainsi le trésor public, sans travailler.

«Ce séjour pourrait être son dernier en Suisse», affirme une source policière qui indique que Paul Biya, malade, serait venu se faire soigner. Des chefs d’Etat se rendent souvent dans l’Arc lémanique dans cette optique. Un haut dignitaire camerounai­s était notamment dans une clinique privée genevoise il y a quelques années. Abdelaziz Bouteflika, alors président algérien, avait passé un séjour très tendu aux HUG en mars 2019.

Paul Biya a fait une série de malaises en avril, serait malade et un remaniemen­t des cartes du pouvoir serait même envisagé, selon une partie de la presse camerounai­se et le site Africa Intelligen­ce.

Quarante ans au pouvoir

Président depuis 1982, Paul Biya est un habitué de l’hôtel Interconti­nental. On ne compte d’ailleurs plus le nombre de séjours qu’il a effectués dans ce cinq-étoiles genevois. En 1998, dans un courrier au directeur du palace, Paul Biya, client depuis 1969, écrit qu’il a effectué son «50e séjour à l’hôtel Interconti­nental de Genève». En 2018, un consortium de journalist­es enquêtant sur la criminalit­é économique (OCCRP) a estimé qu’il avait passé 4,5 ans de sa présidence, de 1983 à 2017, à l’étranger, en grande partie sinon surtout à Genève. L’OCCRP évalue le coût de ces visites à 65 millions de dollars, basé sur une facture de 40 000 dollars par nuit pour sa délégation à l’Interconti­nental. Elle serait près de trois fois supérieure en comptant le prix de la location des avions privés.

Un séjour du président durant l’été 2019 a suscité des grandes manifestat­ions. Une bagarre avait éclaté dans le hall de l’Interconti­nental entre des opposants et les gardes du corps du président. Ces derniers avaient molesté un journalist­e suisse, avant d’être arrêtés et condamnés par la justice genevoise. La police avait recouru à du gaz lacrymogèn­e et à des balles en plastique pour repousser des manifestan­ts.

Le président avait fini par quitter le pays, au grand soulagemen­t des autorités, et on pensait qu’il ne reviendrai­t pas. Il était pourtant de retour en juillet dernier, et à nouveau aujourd’hui.

Paul Biya a quitté Yaoundé samedi en matinée en compagnie de son épouse Chantal Biya «pour un court séjour privé en Europe», selon le compte Twitter de la présidence du Cameroun. Chantal Biya est réputée pour sa coupe de cheveux flamboyant­e. Elle était rousse et bouclée samedi. Parmi ses coiffeurs réguliers figure d’ailleurs une adresse au boulevard Helvétique, au centrevill­e de Genève.

Paul Biya a fait une série de malaises, serait malade et un remaniemen­t des cartes du pouvoir serait envisagé

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