Les usines russes de Renault passent aux mains de Moscou
Acculé par les sanctions frappant la Russie, le constructeur français, leader dans le pays avec la marque Lada, a cédé ses actifs à l’Etat russe, première nationalisation d’ampleur depuis l’offensive contre l’Ukraine
Renault a annoncé lundi la cession de sa participation majoritaire (67,69%) dans le groupe Avtovaz, le géant automobile russe qui possède la marque Lada, au NAMI, l’institut russe de recherche et de développement des automobiles et des moteurs.
Le ministre russe du Commerce et de l’Industrie, Denis Mantourov, avait indiqué fin avril que la transaction se ferait pour «un rouble symbolique», ce que Renault, lundi, ne voulait toujours pas confirmer.
Le groupe automobile français a cédé à la ville de Moscou les actifs en propre de la marque Renault en Russie, dont son usine près de la capitale, qui produisait des Renault et des Nissan.
Le maire Sergueï Sobianine a annoncé que la fabrique allait y relancer la marque soviétique Moskovitch, dont les premières voitures ont été produites en 1946 et qui étaient connues pour leur médiocrité. Le producteur russe de camions Kamaz sera le principal partenaire de l’usine de Moscou, où devraient être produits à terme des véhicules électriques.
Doutes et railleries
Selon l’analyste politique Anton Orekh, essayer de produire une nouvelle voiture à partir de zéro, en l’absence de technologies et de composants étrangers, revient à jeter «des milliards par la fenêtre». L’annonce a aussitôt suscité des railleries. «Quand je rêvais de machine à remonter le temps, je l’imaginais quelque peu différente», a ironisé un internaute, Maxim Dbar, sur Facebook.
La direction de Renault avait déjà annoncé qu’elle allait passer au premier semestre une provision de 2,2 milliards d’euros (2,3 milliards de francs) environ en raison de cette vente.
Renault s’était engagé dans Avtovaz en 2008 pour en devenir l’actionnaire majoritaire en 2014 sous la direction de Carlos Ghosn. Le géant automobile a alors redressé un groupe russe en grande difficulté, ravagé par les crises post-soviétiques. Il en partageait l’actionnariat avec le conglomérat militaro-industriel russe Rostec.
Après de lourds investissements, et des partages de technologie avec Dacia, la marque économique de Renault, Avtovaz commençait à rendre des bénéfices. La Russie était le deuxième marché du groupe Renault dans le monde derrière l’Europe, avec près de 500000 véhicules vendus en 2021.
Le groupe français, constructeur le plus engagé en Russie, et un des derniers à s’en aller, garde la porte entrouverte cependant: il pourra racheter pendant six ans des parts dans Avtovaz.
Mais le marché russe s’est effondré dans le contexte du conflit en Ukraine, et les usines du groupe tournaient au ralenti, voire pas du tout, en raison d’une pénurie de composants importés provoquée par les sanctions occidentales.
Sans prononcer le mot «nationalisation», Vladimir Poutine s’était dit en mars pour la nomination d’administrateurs «externes» à la tête d’entreprises étrangères cherchant à quitter la Russie «pour les transférer à ceux qui veulent les faire fonctionner».
■