Le Temps

Richard Gasquet, les souvenirs et les regrets aussi

Avec classe et autorité, le Français a éliminé l’Australien John Millman lundi au premier tour du Geneva Open (6-3 6-1). Il affronte le numéro 2 mondial Daniil Medvedev mardi et sort une autobiogra­phie mercredi

- LAURENT FAVRE @LaurentFav­re

De près, Richard Gasquet a de très beaux yeux, d’un bleu presque transparen­t. Il a 35 ans, dont vingt de tennis profession­nel, et il faut la proximité d’une salle d’interview réduite à sa plus simple expression – une table, quelques chaises, pas de micro – pour se rendre compte de ce détail. De profonds sillons barrent aussi son front, preuves que si sa victoire sur John Millman fut éclatante (6-3 6-1), le Français n’en a pas moins sué pour l’obtenir.

Que sait-on réellement des joueurs de tennis, qui transpiren­t en plein soleil et se racontent à longueur d’interview? Une image, même incomplète, vaut mille mots, et celle de Richard Gasquet fut toujours liée à la facilité, au talent, à l’inachevé. La faute à un revers à une main d’une classe folle et à une couverture de magazine à 9 ans. Parce qu’il traîne depuis l’enfance «une histoire un peu particuliè­re, avec beaucoup d’attentes», le Biterrois a décidé de se raconter dans un livre qui sort cette semaine (Richard Gasquet. A revers et contre tout, aux Editions Stock). «On a beaucoup parlé de mon cas, autant que ce soit moi qui le fasse.»

«Mon talent ne suffisait pas»

Il y détaille ses souvenirs, ses regrets aussi, et espère que les jeunes lecteurs y trouveront la conviction que «seuls le travail, la persévéran­ce et la passion permettent de profiter de la beauté et des émotions» que ce sport peut apporter. «Ne penser qu’à ça du matin au soir, il n’y a pas d’autre solution pour y arriver.» Son nom est pourtant associé au talent. Il ne dément pas mais aimerait préciser. «J’ai une esthétique en revers, je fais des amorties, mais je n’ai pas que ça. Il m’a fallu beaucoup m’entraîner pour avoir des résultats, parce que sincèremen­t mon tennis ne repose pas sur la facilité. Je ne sers pas à 400 km/h, je ne gagne pas mes points sur un coup, je dois me les construire.»

Vainqueur de 15 titres en simple, 7e mondial en 2007, médaillé olympique (2012), vainqueur de la Coupe Davis (2017), Richard Gasquet est actuelleme­nt 75e mondial. Un classement qui lui permet d’entrer dans les tableaux de Grand Chelem, mais plus de prétendre à de grandes victoires. S’il est le joueur en activité qui totalise le plus de matchs gagnés après le quatuor Nadal-Djokovic-Federer-Murray, il ne les a battus que trois fois, jamais en Grand Chelem, et jamais Nadal, qu’il dominait à 12 ans en finale des Petits As. «J’ai perdu plus de 60 fois contre le Big 3, trois fois en demi-finale de Grand Chelem. Ces gars-là étaient simplement au-dessus de tout le monde. Seul Stan Wawrinka a réussi à se hisser à leur niveau.»

La défaite contre Federer dans le simple décisif de la finale de la Coupe Davis 2014 à Lille est celle qui lui a fait le plus mal. «Avoir pris une branlée du début à la fin, ne pas avoir pu donner un peu d’émotion aux 27 000 personnes qui étaient dans le stade, ça m’a beaucoup affecté.»

Mardi, contre Daniil Medvedev, il aura ses chances. Le Russe est à son avis «le meilleur joueur de la nouvelle génération», mais il n’est pas encore un intouchabl­e, même si son jeu est très spécial. «Il sert hyperfort des aces, et derrière, sur ses jeux de retour, il se met 6 mètres derrière la ligne et il renvoie tout. C’est le seul joueur qui arrive à avoir deux jeux différents.» ■

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