Les géants de la tech étendent leur empire
Les analyses les plus pessimistes ont accompagné les résultats d’Amazon, Alphabet (Google), Apple ou encore Meta (Facebook). En réalité, chacun de ces géants a pourtant réussi à étendre son emprise ces derniers mois
Les mots sont forts. «Apple se rate», «Le trio des titans de la technologie a trébuché sur les résultats de la nuit dernière», «La tech entre dans l’ère de la frugalité»… A lire les dépêches d’agences publiées ces dernières heures, les géants du numérique seraient en danger. Dans la nuit de jeudi à vendredi, Alphabet (Google), Amazon et Apple publiaient leurs résultats pour le dernier trimestre 2022, suivant ceux de Meta (Facebook) et Microsoft, notamment. Jugés décevants par les analystes et une partie des investisseurs, ces chiffres annonceraient-ils le déclin de ces empires technologiques américains? Pas si sûr.
Dans une note publiée vendredi, UBS résumait le sentiment ambiant en une phrase: «Apple a fait état d’une baisse plus marquée de ses ventes, Amazon a prévu un chiffre d’affaires médiocre pour le trimestre en cours, et les résultats d’Alphabet ont manqué de peu les attentes des analystes.» Une déception tous azimuts, donc, ces multinationales ayant dû faire face à une hausse de l’inflation, une prudence accrue des consommateurs et des annonceurs, des soucis d’approvisionnement ainsi qu’une hausse des taux. Mais comme on va le voir, malgré ces éléments négatifs, ces géants ont réussi à étendre leurs territoires.
Apple, devenu omniprésent
Avec un chiffre d’affaires trimestriel de 117,1 milliards de dollars en baisse de 5,4%, un bénéfice net de 29,9 milliards en recul de 13%, Apple ne revendique aucun record financier lors des trois derniers mois. Mais la multinationale a franchi un cap important. «Lors du dernier trimestre, nous avons atteint une étape majeure. Nous avons désormais plus de deux milliards d’appareils actifs, notre base ne cesse de croître», s’est félicité Tim Cook. Le directeur d’Apple a de quoi se réjouir: deux milliards d’iPhone, de Mac ou d’iPad sont actuellement en fonction.
Ces appareils disent quelque chose des revenus passés (lors de leur achat), mais surtout des revenus futurs d’Apple. Car de plus en plus, leurs utilisateurs achètent du stockage en ligne, s’abonnent à Apple Music ou à son service de jeux vidéo ou achètent des applications. Actuellement, la division Services, qui regroupe toutes ses activités, représente près de 18% du chiffre d’affaires total du groupe, après une croissance de 6,4% de ses revenus en un an.
Apple avait franchi la barre du milliard d’appareils actifs en 2016, puis du 1,5 milliard début 2020. Ces douze derniers mois, la société a ajouté plus de 200 millions de téléphones, tablettes et ordinateurs activés. Leurs utilisateurs vont non seulement acheter des services, mais aussi, pour une large part d’entre eux, renouveler à l’avenir leurs appareils chez Apple. En face, Google revendique plus de trois milliards de téléphones Android – ayant accès à son Play Store – actifs.
Amazon, une discrète diversification
Chez le numéro un mondial du e-commerce, pas de revenus en baisse, mais une croissance quasi nulle au regard de son historique: un chiffre d’affaires en progression de «seulement» 9% sur un an, à 149,2 milliards de dollars. Le bénéfice a quant à lui été quasi nul, à 278 millions de dollars, en comparaison avec le résultat net record de 14,3 milliards enregistré un an plus tôt – mais il faut souligner que lors du dernier trimestre, Amazon a dû déprécier de 2,3 milliards la valorisation du fabricant de camions électriques Rivian qu’il possède à environ 18%.
Au-delà des ventes de produits qui ont reculé de 2% – les consommateurs reportant certaines dépenses ou se tournant vers des achats moins onéreux –, Amazon a poursuivi une diversification capitale. Il y a d’abord la croissance de son unité publicité, méconnue mais déjà importante. Lors du dernier trimestre, la multinationale présidée par Jeff Bezos a réalisé un chiffre d’affaires de 11,6 milliards de dollars dans ce domaine, un chiffre en hausse de 19%. Ce dernier point est intéressant: alors que les deux géants du domaine Google et Meta ont fait état d’une baisse de leurs revenus publicitaires, Amazon a progressé sur ce marché.
Selon une étude de la société Insider Intelligence, citée jeudi soir par CNBC, Amazon détient désormais 7,3% du marché mondial de la publicité en ligne, talonnant Alphabet, ainsi que Facebook et Instagram, propriétés de Meta, qui détiennent respectivement 28,8%, 11,4% et 9,1% du marché de la publicité numérique.
«L’intelligence artificielle est la technologie la plus avancée sur laquelle nous travaillons aujourd’hui» SUNDAR PICHAI, DIRECTEUR GÉNÉRAL D’ALPHABET (GOOGLE)
Google, une réplique attendue
Alphabet, maison mère de Google, a elle aussi vu ses indicateurs passer dans le rouge: le chiffre d’affaires trimestriel a reculé de 1% à 76 milliards de dollars, le bénéfice chutant de 34% à 13,6 milliards. Google est en recul sur le marché de la publicité, notamment sur sa plateforme YouTube. Mais l’essentiel est ailleurs: pour rester pertinent, son moteur de recherche doit s’adapter au programme d’intelligence artificielle ChatGPT, que Microsoft va rapidement décliner sur tous ses services.
Directeur d’Alphabet, Sundar Pichai a assuré que sa société allait répliquer. «Tout bientôt, les gens pourront interagir directement avec notre modèle linguistique le plus récent et le plus puissant en tant que compagnon de la recherche, de manière expérimentale et innovante», a-t-il déclaré dans la nuit de jeudi à vendredi. Selon Sundar Pichai, ce nouveau modèle linguistique, baptisé LaMDA, sera publié «dans les semaines et les mois à venir». «L’intelligence artificielle est la technologie la plus avancée sur laquelle nous travaillons aujourd’hui», a promis Sundar Pichai.
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