L’homme qui a vu toutes les éditions du Prix de Lausanne
L’historien lausannois de la danse Jean Pierre Pastori était présent en 1973. Il raconte le coup de génie des fondateurs, Philippe Braunschweig et Elvire Braunschweig-Krémis
Il est entré dans la danse en 1973 grâce au Prix de Lausanne. Jean Pierre Pastori en a fait son histoire personnelle et il en est devenu le mémorialiste enchanté. D’un hiver à l’autre, l’historien du ballet et journaliste lausannois n’a manqué aucune édition. Cette fidélité lui a inspiré un beau livre, constellé de présences, 50 années étoilées. Prix de Lausanne, 19732023 (Ed. Infolio). Avec le temps, son feu ne faiblit pas, bien au contraire, comme si le souffle des fondateurs, Elvire Braunschweig-Krémis – une ancienne danseuse étoile – et son mari Philippe Braunschweig, agissait toujours.
«J’étais tout jeune journaliste et je ne connaissais rien au ballet, raconte Jean Pierre Pastori. J’ai vu ce prix comme une chance. Au Théâtre municipal où il a eu lieu pour la première fois en 1973, j’avais accès à des personnalités considérables. Songez que dans le premier jury il y avait Rosella Hightower, cette étoile qui avait fondé son école à Cannes. C’est là que j’ai rencontré Philippe et Elvire avec qui je suis devenu très ami. Ils me racontaient par le détail les difficultés de leur entreprise.»
Car rien n’allait de soi en 1973. Le génie du couple est de voir grand. Il ne veut pas d’une joute modeste pour assouvir les passions des balletomanes locaux. Il a noué des amitiés avec Rosella Hightower et Maurice Béjart, basé alors à Bruxelles avec sa compagnie, le Ballet du XXe siècle. Il entend les mettre à contribution. «L’idée, c’était de permettre à des talents de parfaire leur formation dans une grande école, poursuit Jean Pierre Pastori. Pour cela, il fallait s’assurer le soutien d’institutions de poids. Le Prix de Lausanne a fait fort dès la première édition avec Mudra – l’école de Béjart à Bruxelles –, le Centre international de danse de Rosella Hightower à Cannes et la Royal Ballet School de Londres, une présence capitale. C’était l’une des plus grandes écoles de ballet du monde!»
Le feu prend immédiatement et, depuis, les étoiles pleuvent. «Une trentaine d’écoles partenaires ont envoyé des élèves cette année, comme toujours. Les représentants de grandes compagnies sont bien présents. Même ceux et celles qui ne sont pas lauréats reçoivent parfois des propositions d’écoles ou de compagnies. Le Prix de Lausanne est un accélérateur de carrière.»
Samedi, Jean Pierre Pastori sera aux premières loges comme toujours, au Théâtre de Beaulieu, avec la même ardeur qu’il y a un demi-siècle. «La finale est tellement plus passionnante! Tout s’est tellement amélioré. Autrefois, les variations des candidats se répétaient jusqu’à l’écoeurement, les délibérations du jury n’en finissaient pas. C’était insupportablement long. Maintenant, ça y va!» Ainsi plane un mémorialiste ailé. A. Df
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