«Profession reporter», le journalisme VHS
Le journalisme, vous l’imaginez, est un métier passionnant. Mais comme pour tout, s’il s’agit de le conter en fiction, il faut amplifier un peu l’ordinaire. Quand j’écris cette chronique par exemple, mon tête à tête avec mon écran n’est pas spécialement dramatique. Il faudrait au moins recourir à quelques bonnes ficelles; une bombe sous ma chaise, ou ma collègue Virginie Nussbaum qui menace de m’étrangler parce qu’elle ne comprend rien à l’une de mes dernières phrases.
Dans Profession reporter, que montre Arte ces temps, le créateur Michael Lucas déploie une stratégie classique débouchant sur une série sympathique. Le jeune ambitieux, d’abord: nous sommes dans une rédaction TV de 1986 en Australie, et Dale (Sam Reid) en veut. Il rêve d’accéder au poste suprême, le plateau du journal de 18h. Mais le colérique patron ne l’envisage pas et lui confie la mission, plutôt tordue pour un junior, de cadrer la star, Helen – l’excellente Anna Torv, vue dans Fringe et Mindhunter, en ce moment à l’affiche de The Last of Us. Elle est la coprésentatrice dudit News at Six, et elle tient aussi à faire ses reportages sur les mères célibataires atteintes du sida dont le boss ne veut pas.
Contre toute attente, un couple professionnel se forme. Et pour émailler leurs journées dans les bureaux ou, parfois, sur le terrain, l’auteur aligne quelques-unes de ces amplifications nécessaires à la fiction: un attentat à Melbourne, une histoire de fake news avant l’heure, une crise majeure dans l’équipe… Contrairement à la série fondatrice d’Apple The Morning Show, Profession reporter (The Newsreader en anglais) joue peu la carte des affaires sentimentales et autres tourments des personnages. Elle reste grosso modo dans le métier, avec cet exotisme en plus, son époque. Nous sommes bien avant le web, alors que les enregistrements vidéos se font notamment sur des VHS à ramener d’urgence au studio… Sans vraiment de nostalgie, mais comme si cette période ajoutait une jolie patine à ces aventures de reporters et d’hommes et femmes-troncs, dont on attend volontiers la deuxième saison, prévue cette année. ■
Une série de Michael Lucas (2021). A voir sur Arte.tv et l’app jusqu’au 9 mai.