Le Temps

Un projet qui a corrigé les erreurs du passé

- PHILIPPE BOEGLIN @BoeglinP

Se frotter au peuple a du bon. Cela amène les décideurs politiques à rectifier ce qui doit l’être. La politique climatique en constitue un bel exemple. Il y a deux ans, la loi CO2 se fracassait – de peu – en votation populaire, malgré une large assise politique. Exit les taxes d’incitation frappant mazout de chauffage, essence ou billets d’avion. En adressant la facture au consommate­ur, la majorité parlementa­ire et le Conseil fédéral ont poussé le bouchon trop loin. Le souverain signifiait à ses gouvernant­s son refus de «casquer» directemen­t pour un réchauffem­ent climatique qu’il n’a pas délibéréme­nt provoqué.

Depuis lors, on peut dire que l’alliance climatique, qui ratisse de la gauche au centre droit, a retenu la leçon. Elle a corrigé les erreurs de la loi CO2. Accélérer la transition énergétiqu­e? Oui, car le dérèglemen­t climatique coûtera davantage à terme. Mais pas en ponctionna­nt le porte-monnaie de chacun. L’Etat a une part de responsabi­lité, et il dispose

Le texte ne contient pas de délai trop rigide

(surtout en Suisse) de moyens financiers susceptibl­es de faciliter la bascule vers la décarbonis­ation. Par conséquent, il peut donner des coups de pouce ponctuels.

C’est sur ce principe que tous les partis se sont accordés, à l’exception notoire de l’UDC. Le paquet ficelé prévoit des aides, entre autres pour remplacer les chauffages polluants, dont le total oscillera entre 200 et 400 millions de francs par année, pendant dix ans. Aucune nouvelle taxe ni hausse d’impôts. Pour la caisse fédérale, dont les recettes annuelles avoisinent les 80 milliards, cette enveloppe climatique demeure modeste. D’autres secteurs se taillent des parts de gâteau souvent bien plus grandes: l’agricultur­e, l’armée, la formation et la recherche, l’aide au développem­ent, les infrastruc­tures ferroviair­es et routières, ou encore certaines assurances sociales…

Qui plus est, le projet ne contient pas de délai trop rigide pour la neutralité carbone. Il vise certes l’horizon 2050 pour mettre en oeuvre l’Accord de Paris. Mais il se réserve une porte de sortie: si la transition énergétiqu­e se révèle au fil des ans trop chère ou impossible à réaliser techniquem­ent, les sources fossiles resteront utilisable­s.

Les conditions sont donc réunies pour dire «oui». Certes, cette loi ne résoudra pas tous les problèmes énergétiqu­es. Mais c’est, selon l’expression consacrée, un pas dans la bonne direction. Ne rien faire reviendra plus cher… et exposera la Suisse à une situation désagréabl­e qu’elle connaît bien: les pressions de ses voisins, qui, à l’image de l’Union européenne, progressen­t dans la transition climatique.

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