Le Temps

Le douteux rachat de deux gangsters en villégiatu­re à Alger

Sortant simultaném­ent à sa présentati­on hors compétitio­n sur la Croisette, «Omar la Fraise», le premier long métrage d’Elias Belkeddar, relève du bon débarras

- NORBERT CREUTZ

Cela commence avec deux gars marchant dans le désert et discutant de règlements de compte entre gangsters à Paris. Le temps d’échanger des sacs avec des Bédouins et de rentrer à Alger se faire voler leur came par une bande rivale, on a saisi l’horizon cinéphile du réalisateu­r Elias Belkeddar, entre Quentin Tarantino et le clip vidéo. Tout espoir suscité par la présence de Reda Kateb et Benoît Magimel s’évanouit déjà devant la fausseté cool des dialogues, la laideur de la photo surcolorée et un montage à la truelle. A partir de là, les choses ne peuvent que s’améliorer… légèrement.

Vie de prince

D’un gros avocat véreux, les deux compères apprennent bientôt qu’Omar (Kateb) a été condamné à 20 ans de prison en France pour divers délits de vol et recel tandis que son ami

Roger (Magimel) bénéficiai­t d’un non-lieu. Fini la vie de princes des nuits parisienne­s, bienvenue au «pays des opportunit­és» qu’est l’Algérie, terre d’origine d’Omar où ils se sont repliés dans une grande villa vide. L’avocat a tôt fait de trouver une couverture à Omar, comme gérant adjoint d’une fabrique de biscuits. Mais c’est sans se douter qu’il traversera­it une vraie crise existentie­lle en craquant pour une employée, la belle Samia (Meriem Amiar), qui dirige l’affaire d’une main de fer.

Prévisible, la suite enterre tout souvenir de Pépé le Moko: comme elle se méfie à juste titre de ce roi de la magouille, il finit par se racheter une conduite pour lui plaire. Le tandem formé par un Kateb maigrichon et un Magimel empâté fait alors place à une romance façon La Belle et le Clochard, et on ne s’en plaindra pas, même si on n’y croit pas une seconde. Le surnom de «la Fraise» cache en effet des cruautés problémati­ques tandis que la mort nécessaire de son «frère» n’est que sordide alors qu’elle se voudrait déchirante. Et on vous passe les gamins de la rue censément sauvés dans la foulée! C’est avec de tels films (même dits «de minuit») que le prestigieu­x label cannois perd trop une partie de sa crédibilit­é.

Newspapers in French

Newspapers from Switzerland