Le Temps

Moscou salue les liens économique­s avec Pékin

DIPLOMATIE Le premier ministre Mikhaïl Michoustin­e est le plus haut dirigeant russe à se rendre à Pékin depuis l’agression de l’Ukraine. Les deux pays veulent renforcer leurs échanges

- FRÉDÉRIC KOLLER @fredericko­ller

Si les sanctions économique­s occidental­es n’ont pas mis à genoux la Russie, c’est en partie grâce à la Chine, qui s’est largement substituée aux Européens pour l’achat d’hydrocarbu­res. Cette coopératio­n économique promet de se renforcer avec une hausse de 40% des échanges au premier trimestre et un objectif fixé à plus de 200 milliards de dollars pour 2023. Un commerce fructueux salué hier par Xi Jinping, qui recevait le premier ministre russe, Mikhaïl Michoustin­e, au Palais du peuple. C’est le plus haut dirigeant russe à faire le déplacemen­t de Pékin depuis l’agression de l’Ukraine. Pour l’occasion, le président chinois l’a assuré de son «ferme soutien» en matière «d’intérêts fondamenta­ux» en rappelant les termes de ses entretiens avec Vladimir Poutine à Moscou en mars dernier pour forger une «nouvelle époque».

Mikhaïl Michoustin­e a participé la veille à un forum économique où il a pu s’entretenir avec plusieurs dirigeants chinois dont le premier ministre, Li Qiang. Les deux hommes n’ont pas évoqué que les livraisons de gaz et de pétrole. Il a aussi été question d’agricultur­e (notamment des livraisons de soja russe, qui pourrait remplacer le soja américain), d’énergie renouvelab­le, de finance, de bois, de drones civils et de constructi­on navale. Les deux hommes ont encore évoqué l’internatio­nalisation du yuan, la monnaie chinoise, afin de se soustraire à l’«hégémonie du dollar» dans les échanges internatio­naux.

Retour à Vladivosto­k

Pékin et Moscou n’ont toutefois pas insisté sur la relation particuliè­re qui les unit dans leur volonté d’imposer «un nouvel ordre multipolai­re». Les deux pays ont au contraire tenté de relativise­r une rencontre présentée comme «normale» entre «pays amis». La presse officielle chinoise est ainsi restée très mesurée sur la significat­ion de la rencontre avec Xi Jinping. Le Global Times, média d’Etat chinois, cite des experts qui évoquent une «visite de routine» et critiquent la «myopie des Occidentau­x» lorsqu’ils évoquent une Chine qui «profiterai­t» du conflit pour bénéficier des hydrocarbu­res russes à bon prix. «La Chine a ses propres plans pour coopérer avec d’autres pays», explique par exemple Zhu Yongbiao, un spécialist­e du programme des Routes de la soie à l’Université de Lanzhou. Le président chinois a rencontré quelques jours plus tôt les dirigeants d’Asie centrale pour un sommet inédit.

Côté russe, on indique qu’il s’agit d’une relation «prometteus­e» et «prioritair­e». «Mais on ne va pas commenter les déclaratio­ns des médias occidentau­x sur la grande Chine et la petite Russie», explique au Temps un diplomate russe en référence au déséquilib­re grandissan­t entre les deux voisins. A partir du 1er juin, le port de Vladivosto­k sera ajouté à la liste des ports de transit par les autorités douanières chinoises. Ce sera la première fois depuis le traité de Pékin de 1860 – par lequel l’empire Qing avait cédé ce territoire à la Russie tsariste et qualifié d’«inégal» par la Chine – que des officiels chinois auront de nouveau accès à ce site. ■

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