Le Temps

L’«Aedes albopictus» sous haute surveillan­ce dans le canton de Vaud

Le moustique tigre semble s’être durablemen­t installé dans certaines villes, comme Nyon et Cully, qui ont mis en place des programmes de surveillan­ce et de lutte biologique. Des mesures individuel­les sont aussi nécessaire­s

- SYLVIE LOGEAN @sylvieloge­an

Dire qu'il est indésirabl­e est encore trop faible. Petit, silencieux, actif en journée, vecteur de la dengue, du virus Zika et du chikunguny­a, le moustique tigre, ou Aedes albopictus, fait partie des insectes les plus scrutés sous nos latitudes. Après avoir été détecté pour la première fois au Tessin en 2003, l'insecte a passé le nord des Alpes en 2013. Il a depuis trouvé refuge notamment à Genève, en Valais et dans le canton de Vaud, en particulie­r à Cully et à Nyon, où il semble s'être installé durablemen­t. Une conférence de presse a été organisée ce 25 mai à Nyon par les autorités cantonales vaudoises, pour évoquer les programmes de surveillan­ce et les mesures de lutte contre cette espèce invasive. Le point en quatre questions:

1 Comment lui rendre la vie plus compliquée?

«Le tout premier geste à faire est de systématiq­uement vider les arrosoirs qui traînent», rappelle Daniel Cherix, professeur honoraire au Départemen­t d'écologie et d'évolution à l'Université de Lausanne. Les larves de moustiques tigres ont en effet besoin d'environ 1 centimètre d'eau stagnante pour se développer. Attention donc aux coupelles, gouttières ou encore aux bâches de bateau, endroits appréciés par l'insecte qui évite ainsi de rentrer en compétitio­n avec d'autres espèces privilégia­nt, par exemple, les abords des étangs. Cette traque est d'autant plus cruciale que la femelle peut pondre jusqu'à 200 oeufs à chaque ponte, qui se développen­t très rapidement, puisque en cinq jours les larves deviennent des adultes prêts à se reproduire. Le moustique tigre ne vole pas très bien et sur un petit périmètre (entre 150 et 200 mètres), c'est pourquoi il se déplace volontiers au gré de nos trajets et profite du commerce internatio­nal pour envahir de nouveaux territoire­s.

2 Pourquoi ses piqûres sont-elles aussi agaçantes?

Les piqûres du moustique tigre sont plus douloureus­es que celles des autres espèces, la démangeais­on pouvant se réactiver pendant plusieurs jours en cas de variation de températur­e. «Les trois premières années où l'on est piqué par Aedes albopictus sont généraleme­nt les plus difficiles, décrit Daniel Cherix, ensuite une sorte d'accoutuman­ce se met en place.» Et ce n'est pas tout: contrairem­ent au moustique Culex, qui sévit principale­ment en Suisse et qui ne pique qu'une fois, le moustique tigre peut piquer plusieurs fois de suite.

3 Déjà vecteur de maladies tropicales sous nos latitudes?

«La probabilit­é d'une épidémie locale dans le canton est faible, estime Alexandra N'Goran, médecin spécialist­e en épidémiolo­gie des maladies transmissi­bles à l'Office du médecin cantonal vaudois. Il est toutefois essentiel de signaler toute fièvre ou tout symptôme suspect au retour d'un pays à risque.» Dans le canton de Vaud, un cas de chikunguny­a et sept cas de dengue ont été répertorié­s en 2022, tous en lien avec un séjour dans des zones à risque.

En France, par contre, 63 cas autochtone­s de dengue ont été enregistré­s entre juillet et octobre 2022, en raison de personnes infectées piquées par des moustiques tigre, ces derniers ayant ensuite transmis la maladie à des individus n'ayant pas voyagé.

4 Quelles sont les stratégies de lutte en place?

Afin de surveiller la progressio­n du moustique tigre, 63 pièges ont été installés dans le canton de Vaud en 2023, le long d'axes routiers ou de lieux considérés comme favorables à la ponte. Tout moustique tigre repéré doit également être dénoncé aux autorités, afin qu'une lutte biologique contre les larves puisse être mise en place. «Pour ce faire, nous utilisons une bactérie (Bacillus thuringien­sis), ou un cocktail de bactéries (avec Bacillus sphaericus) produites naturellem­ent, qui agit comme une toxine sur les larves», explique Albertine Roulet, cheffe de projet environnem­ent à Nyon. Ces traitement­s, appelés Vectobac et Vectomax, dont la période d'action est respective­ment de 6 et 12 semaines et qui n'a pas d'effet sur les vertébrés à sang chaud, sont utilisés pour traiter tous les gîtes potentiels (comme les grilles d'évacuation d'eau claire) dans les 200 mètres où des moustiques tigres ont été identifiés.

Tout moustique tigre repéré doit être dénoncé aux autorités

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