Avoir de la chance, une des clés du succès
Entrepreneur à succès, Thierry Mauvernay préside le groupe pharmaceutique vaudois Debiopharm. Toutes les deux semaines, il livre dans une chronique ses réflexions sur l’entrepreneuriat, extraites de son livre rédigé avec le concours de Giuseppe Melillo, «Ecouter et oser pour entreprendre avec succès», publié en 2022 aux Editions Le Cherche Midi.
Nous croyons, souvent à tort, que le succès peut être rapide et sans effort. C’est faux. Toute réussite, qui semble survenir du jour au lendemain, exige souvent dix ans de travail. «Si votre méthode pour gagner en bourse est réellement aussi simple, pourquoi ne vous copiet-on pas plus souvent?» a demandé le fondateur d’Airbnb, Brian Chesky. L’investisseur Warren Buffett lui a répondu: «La plupart des individus n’aiment pas devenir riches lentement.» A mes yeux, le succès repose avant tout sur un savant mélange de quatre composantes: le talent, le travail, savoir les communiquer et la chance. Pour un grand artiste comme Picasso, le talent aurait largement suffi. Mais pour la majorité d’entre nous, c’est un pourcentage variable de chacun de ces éléments. «Le génie, nous disait Thomas Edison, c’est 1% d’inspiration et 99% de transpiration. »
La bonne fortune, accélératrice de succès
La chance est souvent vue comme une simple variable d’ajustement. Elle permet de se dédouaner d’un échec et est rarement invoquée en cas de réussite. En réalité, elle joue un rôle non négligeable dans le succès. Rappelons-nous d’Uber, d’Airbnb et de Zoom, par exemple, qui ont profité de moments historiques, la crise de 2008 pour les premiers et la pandémie pour le troisième. Généralement, nous n’assumons pas nos responsabilités. Le plus souvent, nous sommes responsables de nos échecs, alors que nous les attribuons à la malchance. A contrario, lors de nos réussites, nous pensons que cela vient de nous alors que le facteur chance a été important.
Pour certains, le cocktail victorieux comportera une grande part de chance, comme pour les gagnants du Loto, même s’ils l’ont provoquée en achetant leur billet. Nombreux sont en effet ceux qui pensent qu’il suffit de saisir sa chance. Pour ma part, je considère que, très souvent, nous devons créer les conditions pour pouvoir ensuite la saisir à la manière d’un train qui passe et dans lequel nous montons. Avoir de la chance n’est pas un acte passif. C’est adopter une attitude d’ouverture, être à l’écoute et réactif. Cette posture mentale ne s’improvise pas. Comme le disait Pasteur, «la chance ne sourit qu’aux esprits bien préparés».
On conseille parfois aux jeunes «lance toi et puis tu verras bien!». C’est une attitude hasardeuse. Si vous participez à un marathon sans entraînement, vos probabilités de gagner sont excessivement faibles. La préparation, c’est-à-dire le travail et le talent, est déterminante et attire la chance. Un entrepreneur doit donc cultiver une ambition, autrement dit, avoir la volonté de réaliser une vision. Il doit savoir être obstiné et poursuivre un but avec volonté et détermination: c’est la persévérance. S’entêter quand la voie est sans issue, en revanche, est le signe d’un blocage émotionnel. Il est important de faire cette distinction tout en sachant que placer le curseur au bon endroit est difficile. Elon Musk a été à une époque l’emblème d’un entrepreneur talentueux et qui travaille énormément. Il a été aussi un formidable communicateur et il a su surfer sur la vague des mouvements écologistes. Cela a été souvent répété: Tesla n’aurait pas pu être inventée par les ingénieurs et les managers de General Motors.
Cependant, la chance, le travail et le talent ne garantissent pas le succès. Savoir communiquer est aussi indispensable à la réussite. Le professeur de design hongrois, Erno Rubik a pu créer en 1974 le cassetête qui porte son nom. Mais son invention n’a eu aucun succès. La folie du Rubik’s Cube n’a déferlé sur la planète six ans plus tard que grâce au talent de communicateur de Tom Kramer.
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