Un manque de données sur les violences domestiques
La semaine dernière, deux femmes ont été tuées par leur partenaire. Face à la difficulté d’évaluer le suivi des auteurs de violences, le Conseil d’Etat promet une enquête
Entre les deux dernières séances du Grand Conseil vaudois, deux femmes sont mortes sous les coups de couteau de leur partenaire. Depuis début 2023, elles sont huit en Suisse, tuées à la suite de violences au sein du couple, dont trois sur le sol vaudois. Ces crimes ont eu des échos hier dans l’hémicycle cantonal. Des députées réclament un renforcement des mesures, mais aussi un bilan chiffré du suivi pénal des auteurs de violences domestiques.
«L’actualité nous rappelle que c’est chez elles que les femmes sont le plus en danger», a souligné Valérie Induni. «Nous continuerons à exiger des hébergements pour les victimes, la saisie des armes et des mesures d’éloignement et de surveillance pour les conjoints violents. Des moyens de détection pour les professionnels de la santé ou du social. Des actions de prévention dans les établissements de formation», poursuit la députée socialiste, également membre du groupe parlementaire féminin (Intergroupe F).
«Ces drames doivent nous interroger sur la lutte contre les violences sexistes et sexuelles», renchérit Joëlle Minacci, du groupe Ensemble à gauche. «Malgré le fait que le canton avance sur certains de ces dossiers, ses moyens doivent absolument être renforcés.»
Hasard du calendrier, ce même jour, un postulat de Muriel Thalmann pointait le manque de connaissance du suivi des auteurs de violences domestiques au niveau pénal malgré les modifications des bases légales. Depuis l’entrée en vigueur de la loi d’organisation de la prévention et de la lutte contre la violence domestique (LOVD), en 2018, la justice peut astreindre les auteurs de violences à un entretien socio-éducatif. Et depuis 2020, la suspension d’une procédure peut être assortie d’une obligation de suivre un programme de prévention pour auteurs.
L’Unil mandatée
Or, il n’y a pas de statistiques permettant d’évaluer les effets de ces actions, sur le taux de récidive par exemple, et d’ajuster le cadre légal si nécessaire, souligne le texte de Muriel Thalmann. Constatant que les données manquent faute de moyens informatiques, la Commission des affaires juridiques chargée de traiter ce postulat appelle de ses voeux une étude permettant d’évaluer le traitement pénal d’auteurs de violences et recommande de classer le texte, finalement retiré par la députée socialiste.
Entre-temps, le gouvernement vaudois a fait un pas en direction de cet objectif, a relevé hier la conseillère d’Etat Christelle Luisier. L’Etat a mandaté la faculté des sciences criminelles de l’Université de Lausanne pour évaluer le suivi des auteurs dans la chaîne pénale du canton de Vaud, a annoncé l’élue PLR. Cette étude démarrera cet été et ses conclusions sont attendues en 2024, notamment pour répondre aux lacunes mises en évidence par le Groupe d’experts internationaux du Conseil de l’Europe sur la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique (Grevio), chargé d’évaluer l’application de la Convention d’Istanbul en Suisse. ■
«C’est chez elles que les femmes sont le plus en danger»
VALÉRIE INDUNI, DÉPUTÉE SOCIALISTE