Le Temps

Un nouveau projet de Lex Ukraine à la trappe

Le Conseil national saborde un projet qui voulait autoriser les réexportat­ions d’armement helvétique vers Kiev. Un texte plus complet pourrait passer ces prochaines semaines

- PHILIPPE BOEGLIN, BERNE @BoeglinP

Les réexportat­ions d’armes suisses à destinatio­n de l’Ukraine vont demeurer interdites, du moins pour quelque temps. Le Conseil national a enterré hier par 98 voix à 75 une propositio­n intitulée «Lex Ukraine» qui voulait faire une exception en faveur de l’armée ukrainienn­e, toujours en guerre contre l’envahisseu­r russe. Sa validité se serait arrêtée à la fin 2025, avec possibilit­é de la prolonger pour deux ans en cas d’accord du parlement.

La commission de sécurité du Conseil national avait donné suite au projet, celle du Conseil des Etats avait refusé. L’arbitrage effectué par la plénière du Conseil national coule définitive­ment le texte. Les Vert·e·s, le PLR et l’UDC ont majoritair­ement voté non; Le Centre, les vert’libéraux et la plupart des socialiste­s ont dit oui.

La position du Conseil fédéral continue donc de faire foi: pas question d’envoyer à Kiev du matériel de guerre de fabricatio­n suisse, en vertu d’une interpréta­tion stricte de la neutralité.

L’UDC se bat dans le même camp. «La neutralité suisse peut-elle être mise entre parenthèse­s ainsi?» a interrogé de manière purement rhétorique Jean-Luc Addor (UDC/ VS), poursuivan­t: «La neutralité constitue-t-elle encore un outil préservant l’indépendan­ce et l’autonomie de la Suisse?» «La neutralité permet justement d’assurer notre sécurité», a contré François Pointet (PVL/VD). De ce point de vue, la Suisse enverrait avec la loi un signe de solidarité à ses partenaire­s.

Compromis en point de mire

Le parlement devrait bientôt délibérer d’un compromis élaboré par les socialiste­s et les PLR, et qui bénéficie d’un préavis positif des deux commission­s de sécurité. Si le texte passe, les réexportat­ions seraient autorisées à différente­s conditions, cinq ans après l’achat auprès du fabricant suisse.

D’abord, les pays réexportat­eurs devraient être «attachés à nos valeurs» et contrôler leurs exportatio­ns d’armes de façon similaire. Puis ils pourraient envoyer leur matériel suisse à un autre Etat en guerre, mais uniquement s’il se défend contre une agression militaire illégale au sens du droit internatio­nal. Pour cela, la guerre devrait être dénoncée par le Conseil de sécurité de l’ONU, ou les deux tiers de l’Assemblée générale de l’ONU. ■

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