Le Temps

Pour faciliter la vie des PME, créons un statut officiel d’entreprise durable!

- JOSEF DITTLI, CONSEILLER AUX ÉTATS (PLR/UR) ET SOPHIE MICHAUD GIGON, CONSEILLÈR­E NATIONALE (LES VERT·E·S/VD); SECRÉTAIRE GÉNÉRALE, FÉDÉRATION ROMANDE DES CONSOMMATE­URS

Alors que le World Economic Forum s’organise et que les panels autour de la durabilité vont se multiplier dans la station grisonne, une large alliance propose une étape concrète pour améliorer la compétitiv­ité des entreprise­s suisses.

Les PME qui ont un agenda durable sont mieux positionné­es vis-à-vis de leurs investisse­urs, consommate­urs, employés et clients. Pourtant, la plupart des PME suisses dénoncent un manque de clarté sur la voie précise à suivre. Nous souhaitons l’officialis­ation du statut d’entreprise­s durables, comme d’autres pays le font.

Prenons quelques exemples. Située à Villeneuve, Biscuits Agathe, entreprise familiale suisse, développe, fabrique et vend des petits biscuits depuis 1954. Aujourd’hui, cette entreprise, comme beaucoup d’autres dans le secteur, fait face à des demandes spécifique­s concernant les emballages et à des exigences sur l’origine des ingrédient­s. Dans un autre secteur, celui de la microtechn­ique et de l’horlogerie, nombreuses sont les PME qui doivent désormais respecter une liste de critères de durabilité qui couvrent la traçabilit­é des matières et les conditions de travail dans leur chaîne d’approvisio­nnement. Confrontée­s à des contrats de plusieurs millions, elles sont en difficulté si elles ne peuvent pas établir un positionne­ment solide et clair. Les normes deviennent pour elles un élément stratégiqu­e.

Une identifica­tion juridique officielle possible est une demande de longue date et la Suisse doit combler ce retard. Cinq cents chef·fe·s d’entreprise se sont fédérés dans l’Alliance pour les entreprise­s durables, une coalition qui inclut des fédération­s économique­s et des organisati­ons de la société civile de toute la Suisse. De nombreux autres pays ont suivi cette voie avec des changement­s législatif­s. Società benefit, «entreprise à mission», sociedades de beneficio e interés común… L’Italie, la France, l’Espagne, le RoyaumeUni, tous ont adopté des cadres réglementa­ires reconnaiss­ant les entreprise­s qui concilient planète, population et profit.

Pour de nombreuses PME suisses, répondre aux exigences en matière environnem­entale, sociale et de gouvernanc­e (ESG) n’est pas un choix mais une nécessité pour survivre, continuer à être concurrent­ielles par rapport aux pays voisins. Or, il y a un paradoxe au coeur de la réponse de notre pays à ce défi. Le Conseil fédéral a montré une réticence à articuler une vision claire pour l’avenir de notre économie, en particulie­r pour guider les PME à travers cette transforma­tion. Pourtant, les normes internatio­nales et européenne­s de durabilité, peuvent présenter des opportunit­és d’innovation et de leadership au lieu d’être perçues comme des nécessités encombrant­es.

Les soussignés attendent du Conseil fédéral qu’il agisse dans l’intérêt de nos entreprise­s. Une initiative parlementa­ire dans ce sens a été déposée au Conseil national. Elle vise à introduire un cadre juridique facultatif et volontaire pour les entreprise­s durables, qui pourrait changer la donne. Elle permettrai­t aux entreprise­s qui mettent en oeuvre des stratégies de durabilité – à travers des engagement­s concrets, mesurables et comparable­s – de se distinguer en adoptant le statut d’ «entreprise durable». Cette possibilit­é devra être introduite dans le Code des obligation­s. Ce sera aussi un moyen pour une PME d’y voir plus clair dans la jungle des standards et réglementa­tions et de démontrer son engagement à son échelle. Cette approche permet de concilier la tradition libérale suisse et la nécessité de répondre aux nouveaux impératifs du marché. Il s’agit de stimuler – non d’imposer –, d’inspirer les PME suisses à se préparer pour l’avenir sans les contraindr­e.

Tandis que le Conseil des Etats vient d’accepter le postulat participan­t de la même stratégie et demandant une vue d’ensemble des nouvelles directives européenne­s et internatio­nales en matière de durabilité pour les PME suisses, ainsi que des pistes pour les accompagne­r en Suisse. Ce faisant, la Suisse a l’opportunit­é de redéfinir la «Swissness» au XXIe siècle – non seulement comme symbole de qualité et de précision, mais aussi comme emblème de durabilité et de vision pour l’avenir. Le secteur privé a un vrai potentiel de transforma­tion des défis posés par la durabilité, ils peuvent représente­r ainsi des opportunit­és d’innovation et de leadership sur la scène mondiale. ■

Les normes internatio­nales de durabilité peuvent présenter des opportunit­és d’innovation et de leadership

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