Le Temps

Demander de l’aide n’est pas un aveu de faiblesse

- MATHILDE APPIA DIRECTRICE DE LA FONDATION QUALIFE

En ce début d’année 2024, le téléphone du pôle 50 +de la Fondation Qualife s’agite. Il semblerait qu’un certain nombre de personnes de plus de 50 ans en recherche d’emploi et non accompagné­es par le chômage aient pris la résolution de demander de l’aide pour être plus efficaces dans leurs démarches. Des profils que nous nous réjouisson­s d’accompagne­r dans la recherche de leur futur employeur.

Mais pourquoi avoir besoin d’un cap symbolique comme celui du passage à la nouvelle année pour oser aller chercher du soutien là où il se trouve?

Demander de l’aide. Trois mots en apparence simples, mais qui, pour beaucoup, impliquent une certaine lutte psychologi­que avec soi-même pour y arriver. Cette difficulté varie d’une personne à l’autre, mais également selon des paramètres culturels et de genre.

En effet, admettre que l’on a besoin d’assistance peut représente­r un grand défi dans une société comme la nôtre qui valorise l’indépendan­ce et l’autonomie, et pointe d’un doigt réprobateu­r les échecs. On a tendance à demander de l’aide qu’en dernier recours, quand «vraiment on a tout essayé et qu’on n’y arrive pas». Ainsi, cette demande est vécue comme un aveu implicite d’incapacité à résoudre ses propres problèmes. Comme la preuve de notre faiblesse, de notre incompéten­ce.

Dans les cultures qui mettent l’accent sur la communauté et le soutien mutuel, la demande d’assistance est considérée au contraire comme une preuve de confiance qui vient renforcer les relations interperso­nnelles. La démarche prend alors une tout autre significat­ion et en est grandement facilitée.

Les études montrent également des différence­s significat­ives entre hommes et femmes quant à la dispositio­n à demander de l’aide. Les hommes, dont on valorise la virilité et l’indépendan­ce, hésitent à montrer une quelconque vulnérabil­ité en demandant de l’aide. Les normes culturelle­s sont plus clémentes pour les femmes, dont on valorise l’empathie et la communicat­ion. Mais ces dernières peuvent parfois vouloir lutter contre ces stéréotype­s, en prouvant justement qu’elles peuvent y arriver seules.

Cette difficulté à demander de l’aide devrait nous questionne­r. Face à l’adversité, est-il plus admirable de s’obstiner à y arriver seul·e ou de reconnaîtr­e ses propres limites et de les contourner en allant frapper aux bonnes portes?

J’ai personnell­ement une admiration profonde pour les gens qui demandent de l’aide. Cette démarche implique une vraie connaissan­ce de soi, de l’humilité, de la proactivit­é, de l’optimisme, du courage et de l’humanité. Que de belles qualités!

Et lorsque l’on parle recherche d’emploi, il est d’autant plus important de déstigmati­ser la demande d’aide. Le temps qui passe dessert les personnes qui recherchen­t un travail. Ainsi, aller chercher du soutien le plus rapidement possible pour s’outiller est la meilleure chose à faire. La marche n’est pas toujours facile à franchir, elle est néanmoins rarement regrettée.

Voilà donc une bonne résolution pour 2024: transforme­r notre regard sur la demande d’aide et ne plus attendre pour aller chercher du soutien.

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