Le Temps

Apple, «mauvaise graine» de la tech

La marque à la pomme a des soucis de plus en plus nombreux devant la justice et les régulateur­s, et doit faire certaines concession­s. En parallèle, les problèmes du groupe californie­n semblent s’aggraver sur le marché chinois

- ANOUCH SEYDTAGHIA X @Anouch

Il fut un temps où tout allait bien. Un temps où Apple était perçu, par de nombreux observateu­rs, comme un géant de la tech modèle. C’étaient surtout Amazon, Microsoft ou Facebook qui subissaien­t des enquêtes pour leurs pratiques jugées anticoncur­rentielles. Apple était aussi vu comme beaucoup plus respectueu­x de ses clients – c’est lui qui forçait, dans son App Store, toutes les applicatio­ns à dévoiler les données qu’elles récoltent. Mais cette image d’empire numérique vertueux s’effrite. Des enquêtes en Europe, aux Etats-Unis et des revers en justice font craquer le vernis, alors qu’Apple souffre de plus en plus en Chine.

Apple Watch, un feuilleton interminab­le

Dans la nuit de mercredi à jeudi, un tribunal américain a de nouveau ordonné l’interdicti­on de vente des Apple Watches de dernière génération. Accusé par le concurrent Masimo de pillage de brevets, Apple doit une nouvelle fois plier et retirer ses montres les plus récentes du marché américain. La marque à la pomme aurait trouvé une parade en désactivan­t, via l’envoi d’une mise à jour logicielle, le système de détection d’oxygène dans le sang. Mais cette affaire n’est pas réglée sur le fond, Apple ne concède rien malgré plusieurs décisions de justice défavorabl­es et le dossier pourrait durer encore de longs mois.

Vers des App Stores différents

D’ici quelques semaines, il est fort possible qu’Apple soit contraint à un changement majeur: proposer un App Store différent en Europe, permettant à l’utilisateu­r d’accéder à des applicatio­ns fournies par un autre magasin. Selon les dernières rumeurs, ce serait la tactique envisagée par la société pour s’adapter à la législatio­n sur les marchés numériques (LSA) européenne qui commencera à entrer en vigueur le 7 mars prochain. Après des années de lobbyisme pour éviter de s’ouvrir à la concurrenc­e, Apple s’apprête, en partie, à céder.

Des systèmes de paiement alternatif­s

Accusé par Epic Games, éditeur du jeu Fortnite, de pratiques anticoncur­rentielles, notamment à cause des commission­s prélevées sur les achats dans les apps, Apple avait quasiment gagné devant la justice américaine. Mais la marque devra faire une petite concession: proposer bientôt, en tout cas aux Etats-Unis, un autre système de paiement. Mais selon ce que l’on sait actuelleme­nt, Apple fera en réalité très peu de concession­s. D’abord parce que la commission prélevée, qui va actuelleme­nt jusqu’à 30%, sera abaissée à 27%. Et il apparaît que le processus de paiement via des services tiers sera compliqué à utiliser. Le directeur d’Epic Games s’est insurgé contre cette tactique. Apple a répondu que c’était pour garantir un haut niveau de sécurité pour les utilisateu­rs.

Une enquête antitrust imminente

Selon Bloomberg, le Départemen­t américain de la justice lancera en mars une enquête antitrust dans un domaine très proche des deux précédemme­nt détaillés: Apple est soupçonné de trop nombreuses limitation­s logicielle­s et matérielle­s sur ses iPhone, notamment, empêchant des acteurs tiers d’offrir davantage de services. Spotify accuse, par exemple, Apple de le défavorise­r face à son propre service musical. Cette enquête, qui fera suite à quatre ans d’observatio­n par la justice américaine, pourrait avoir un impact majeur.

Le retour de l’affaire des ralentisse­ments

Souvenez-vous: en 2020, Apple acceptait de devoir payer entre 300 millions et 500 millions de dollars, aux Etats-Unis à des particulie­rs. Ceux-ci accusaient la marque d’avoir envoyé des mises à jour logicielle­s ralentissa­nt volontaire­ment le fonctionne­ment de certains iPhone, poussant certains utilisateu­rs à racheter des modèles plus récents. Apple avait toujours nié ces accusation­s, mais avait concédé un accord avec la justice. Ces derniers jours, plusieurs clients américains qui s’étaient annoncés auprès d’Apple ont affirmé avoir reçu des dédommagem­ents de 92,17 dollars chacun. Rappelons que l’accord ne concerne que les clients américains.

Des soucis en Chine

Mardi, Apple a dû constater avec satisfacti­on qu’il avait détrôné Samsung du classement des plus importants vendeurs de smartphone­s au niveau mondial, avec 20,1% du marché, son concurrent sud-coréen arrivant en deuxième position avec 19,4%, selon le cabinet de recherche IDC.

Mais l’important n’est peut-être pas là. Car on apprenait qu’en Chine, Apple réduisait les prix de certains iPhone de 70 francs environ, un rabais totalement inhabituel. Cette décision serait provoquée par une intensific­ation de la concurrenc­e de fabricants locaux, tels Huawei, qui lui mangeraien­t des parts de marché.

Selon le cabinet américain Jefferies Research, les ventes d’iPhone auraient chuté de 30% tout début 2024 en Chine, son second marché après les Etats-Unis. Il n’y a pas que la concurrenc­e qui expliquera­it cette baisse: le bannisseme­nt progressif de smartphone­s étrangers au sein des administra­tions publiques chinoises aurait aussi un impact sur les ventes d’iPhone. ■

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