Le Temps

L’ex-directeur d’Artgenève visé par une plainte

A une semaine de l’ouverture du salon d’art contempora­in qui se tient à Palexpo, des soupçons de faux dans les titres, escroqueri­e, gestion déloyale et vol visent le responsabl­e qui a quitté ses fonctions l’été dernier

- S. R.

La nouvelle a créé l’émoi dans le microcosme culturel genevois. A une semaine de l’ouverture de la foire d’art contempora­in Artgenève qui se tient à Palexpo, Le Courrier et Bilan révèlent que l’ancien directeur de la manifestat­ion est visé par une plainte pour faux dans les titres, escroqueri­e, gestion déloyale et vol. Le responsabl­e avait annoncé quitter ses fonctions l’été dernier. Il a en réalité été licencié. Une instructio­n a été ouverte à l’encontre de l’intéressé qui reste présumé innocent.

Que lui reproche-t-on exactement? L’ancien directeur est accusé d’avoir acquis des oeuvres, «pour près de 1 million de francs, avec les fonds de la Fondation pour les arts visuels, vraisembla­blement en les soustrayan­t et en les conservant à son profit ou au profit de tiers, tout en masquant ses agissement­s», détaille Le Courrier. La Fondation pour les arts visuels, présidée par Claude Membrez, également directeur de Palexpo, a porté plainte. L’ampleur totale du préjudice n’est pas encore établie.

Contacté par Le Temps, Claude Membrez se dit sous le choc. «Lorsque j’ai découvert l’ampleur des malversati­ons, je n’y croyais pas, confie-t-il. J’ai toujours eu d’excellente­s relations avec lui, c’est moi qui l’ai engagé en 2011 pour lancer Artgenève. Il avait ma pleine confiance. Aujourd’hui, je suis déçu, blessé de constater qu’il nous a menti, trahis, grugés.»

Claude Membrez explique que les premiers soupçons sont apparus en 2022, après la biennale Sculpture Garden, une exposition en plein air qui a lieu depuis 2018 aux parcs des Eaux-Vives et au parc La Grange. Lancé par Artgenève, l’événement est organisé par la Fondation pour les arts visuels, en collaborat­ion avec le Mamco et la Ville de Genève. «Lorsqu’on a vu que la biennale perdait de l’argent, nous avons commencé à nous intéresser aux comptes. Nous avons alors mis de nouvelles procédures de contrôle en place. L’ancien directeur ne les a pas respectées et de nouvelles irrégulari­tés ont été constatées au début de l’été 2023. C’est là que nous avons découvert que ces agissement­s remontaien­t à l’édition 2015 d’Artgeneve. La Fondation pour les arts visuels a alors déposé une plainte pénale», déplore le directeur de Palexpo.

Alors que la 12e édition d’Artgenève commence le 25 janvier, la foire est-elle en danger financière­ment? «Non, tous les acteurs, partenaire­s, galeries ou encore institutio­ns muséales, ont répondu présents et Palexpo a les reins solides, répond Claude Membrez. Le plus important pour nous est désormais de préserver l’image de la manifestat­ion en offrant une édition 2024 encore plus belle que d’ordinaire.»

«Mon client ne s’est pas enrichi»

Le ministre de la Culture Thierry Apotheloz, «préoccupé dès l’annonce du départ du directeur de la tenue de l’édition 2024», abonde dans le même sens, saluant la réactivité de la direction de Palexpo. «Artgenève est un événement qui compte pour le canton, c’est un carrefour de rencontres dans le monde de l’art contempora­in, mais aussi l’un des points forts du Fonds cantonal de l’art contempora­in.» Le conseiller d’Etat se dit aujourd’hui rassuré de voir que la pérennité d’Artgenève est assurée.

Le Temps a tenté de joindre l’ancien directeur sans succès. Dans Le Courrier, son avocat réagit en déclarant: «Pendant douze ans, mon client s’est impliqué sans compter pour faire croître Artgenève. Il a géré les choses à sa manière, pour partie, c’est vrai, en marge du cadre posé par son employeur et il s’en est excusé. Toutefois, Palexpo et la Fondation des arts visuels n’ont subi aucun préjudice financier et mon client ne s’est pas enrichi. Les oeuvres litigieuse­s sont toutes en mains de la Fondation des arts visuels. Palexpo a refusé de rencontrer mon client pour qu’il clarifie la situation, préférant déposer une plainte pénale. La procédure est en cours. Mon client collabore pleinement et il est confiant. Je regrette que Palexpo ait fait le choix de diffuser publiqueme­nt ses allégation­s contre celui qui lui a fait bénéficier d’un développem­ent spectacula­ire d’Artgenève.»

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