Un revirement qui portera à conséquence
C’est une volte-face qui a de quoi surprendre. La Banque cantonale de Neuchâtel (BCN) a décidé de ne plus permettre à ses clients d’effectuer du négoce de cryptomonnaies.
Une décision qui ne satisfera évidemment pas les quelque 70 entreprises actives à Neuchâtel dans le secteur des cryptomonnaies et de la blockchain. Un tissu local que de nombreux acteurs privés comme publics se sont efforcés de tisser au fil des années. Loin de la réputation sulfureuse habituellement associée à cette nouvelle économie, l’écosystème neuchâtelois s’est distingué par sa relative discrétion. En dix ans, ni le canton ni la BCN n’ont eu affaire à une mauvaise surprise. Ce d’autant plus que la Suisse a réglementé ce secteur relativement tôt, apportant davantage de sécurité.
Grâce à une politique volontariste appuyée par le Conseil d’Etat, Neuchâtel a donc pu construire un secteur robuste et dynamique. La stratégie n’a jamais consisté à attirer des entreprises à n’importe quel prix.
Bien au contraire. Des processus bien rodés ont été mis en place pour s’assurer que chaque implantation respecte des critères de qualité et, bien entendu, de conformité. Avant même qu’un projet ne soit soumis à la BCN, il était passé en revue par le Service de l’économie et des partenaires tels que des cabinets d’avocat.
L’écosystème crypto à Neuchâtel risque d’être durablement fragilisé
Au fur et à mesure, certains acteurs ont acquis une réputation et une crédibilité qui leur ont fait jouer un rôle important dans le développement de cet écosystème. Les projets bidons ont été systématiquement écartés. En quelques années, Neuchâtel s’était positionné en véritable terre d’accueil de ce nouveau mouvement entrepreneurial.
Comme toute entreprise privée, la BCN est amenée à faire des choix, et ceux-ci lui appartiennent. On ne peut toutefois que constater les conséquences funestes de ce changement de politique. Les entreprises concernées trouveront peut-être une solution. Mais l’écosystème risque d’être durablement fragilisé. C’est un mauvais signal adressé à l’ensemble des acteurs concernés.
Les conditions-cadres solides qu’offrait jusqu’ici Neuchâtel sont désormais incertaines. L’ironie de l’histoire, c’est que cette nouvelle économie cherche justement à mettre en place des mécanismes favorisant la désintermédiation et la décentralisation dans le secteur financier. En dépendant à ce point d’un seul établissement bancaire, le secteur démontre la fragilité des écosystèmes qui reposent sur un petit nombre d’intermédiaires. De quoi mettre de l’eau à leur moulin.
■