Le Temps

Dix ans de prison pour un pédocrimin­el

VAUD Au vu de sa culpabilit­é «écrasante» et du risque de récidive, la Cour criminelle de La Côte a lourdement condamné hier un jeune homme pour actes d’ordre sexuel avec des enfants. Le verdict a été donné en l’absence du prévenu qui avait refusé de sorti

- YAN PAUCHARD @yanpauchar­d

Tout au long de son procès, il avait rejeté les accusation­s. Devant la Cour criminelle de La Côte, à Nyon, P., un Vaudois de 24 ans, avait contesté être ce prédateur sexuel qui, via une applicatio­n de live chat, avait poussé des femmes à commettre d’abominable­s actes sexuels sur leurs propres enfants. Il n’avait eu de cesse de se prétendre victime d’une vengeance et de pirates informatiq­ues. Ce vendredi matin, le prévenu s’est encore plus enfermé dans le déni, refusant de sortir de sa cellule de la prison de la Croisée à Orbe pour venir au verdict. C’est donc en son absence (les juges ont renoncé à émettre un mandat d’amener) que la Cour a condamné le jeune homme à 10 ans de prison, la peine la plus lourde prévue par le Code pénal pour ce type d’infraction­s.

Thèse des hackers écartée

Lors de la lecture du jugement, les mots du président du Tribunal, Aurélien Michel, ont été particuliè­rement durs. Aux yeux de la justice qui a écarté la théorie d’un piratage informatiq­ue, la culpabilit­é du prévenu est «écrasante», celui-ci ayant profité de la vulnérabil­ité financière de ses victimes pour assouvir ses pulsions sexuelles. Le juge a encore souligné la durée de ses agissement­s qui, ne se sont arrêtés qu’avec son arrestatio­n, et le nombre de cas. Durant l’enquête, la police a recensé 32 conversati­ons où l’accusé a explicitem­ent demandé des pratiques sexuelles avec des enfants, l’acte d’accusation retenant au final neuf cas clairement prouvés.

L’affaire demeure aussi inhabituel­le qu’abjecte. De janvier 2020 à juin 2021, P. a ainsi pris contact avec des femmes à l’étranger, en particulie­r aux Philippine­s, via une applicatio­n. En échange d’argent, il les a incitées et en a convaincue­s certaines d’accomplir devant les caméras des actes sexuels sur leur propre progénitur­e. Il s’est également masturbé demandant que ces enfants regardent. Il finira par passer à l’acte, ici, en Suisse. En juin 2021, il a profité d’un barbecue familial pour emmener à l’écart la filleule de son père afin de lui montrer son pénis et lui toucher le sexe. Malgré les dénégation­s de P., son profil ADN a été retrouvé sur la culotte de la fillette. C’est la dénonciati­on des parents de celle-ci qui déclencher­a la procédure.

Absence de prise de conscience

Le Tribunal de La Côte s’est montré plus sévère que le Ministère public qui avait requis 8 ans, lundi dernier

Reconnaiss­ant P. coupable de plusieurs chefs, dont actes d’ordre sexuel avec des enfants, actes d’ordre sexuel sur une personne incapable de discerneme­nt ou de résistance, d’instigatio­n à actes d’ordre sexuel avec des enfants et exhibition­nisme, le Tribunal de La Côte s’est montré plus sévère que le Ministère public qui avait requis 8 ans, lundi dernier. Pour les juges, le manque d’émotion manifesté par le prévenu et son absence de prise de conscience – il a pour l’heure refusé tout suivi thérapeuti­que en prison – ont pesé lourd. Tout comme le risque de récidive estimé par les experts «plus élevé que la moyenne». Aurélien Michel a encore insisté sur «la dangerosit­é» de celui qui a été diagnostiq­ué avec un grave trouble de la préférence sexuelle de type pédophilie.

A la sortie du tribunal, Dario Barbosa, l’avocat de P., n’a pas souhaité faire de commentair­e quant à un éventuel appel, au vu de l’absence de son client. Une attitude de fuite qui démontre selon Albert Habib, avocat de la partie plaignante, «tout le déni et la lâcheté» du prévenu. Ironie, le père de ce dernier était, lui, venu ce vendredi à Nyon pour soutenir son fils. Assis dans la partie réservée au public, il a écouté digne et ému la sentence des juges, offrant une once d’humanité à ce procès.

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