Le Temps

Le Valaisan Martin Bender, un pur produit du circuit

Le jeune homme de 19 ans dispute samedi à Verbier sa première épreuve au plus haut niveau de sa discipline. Son entrée sur le Freeride World Tour est l’aboutissem­ent d’un parcours tracé par les organisate­urs

- VINCENT GILLIOZ @VGillioz

Martin Bender connaît déjà bien le Bec des Rosses. Il skie «tout le temps» à Verbier, ne manque jamais de regarder la face mythique qui a vu naître l’Xtreme et l’a déjà skiée «deux fois pour le fun». Samedi, ce sera différent: le jeune Valaisan de 19 ans va y vivre son baptême du feu à l’occasion de la première étape du Freeride World Tour (FWT).

Il s’est fixé de terminer parmi les 11 premiers, le minimum pour accéder à la finale du championna­t, qui se déroulera fin mars au même endroit, mais sa simple présence au départ constitue déjà un succès: celui de la structure de formation mise en place par les organisate­urs du circuit, qui s’appelait FWT Club à l’origine, FWT Academy aujourd’hui.

Pour Nicolas Hale-Woods, cofondateu­r de l’Xtreme et patron du FWT, le jeune Bender est la preuve vivante que le freeride est devenu une discipline à part entière. «Il fait partie de cette nouvelle génération qui s’est formée exclusivem­ent à ce sport. Elle maîtrise ses codes et ses exigences. Au début, les athlètes venaient surtout d’autres milieux, comme l’alpin ou le freestyle. Aujourd’hui, c’est de moins en moins le cas, le freeride n’est plus une transition.» L’engouement de l’Academy appuie son propos: «Cette année, il y a eu 250 demandes d’adhésion, et il n’y

«J’ai skié jusqu’à 100 jours par an. La structure nous a permis de rencontrer d’autres adeptes» MARTIN BENDER

avait que 160 places. Ça démontre que l’offre que nous avons créée correspond à une demande. Nous travaillon­s à développer le concept dans d’autres lieux, en Suisse et à l’étranger.»

Enfant du pays

On n’en était pas encore là il y a dix ans, quand Martin Bender, son frère et une vingtaine d’autres enfants s’engageaien­t à passer tous leurs samedis d’hiver, ainsi que deux semaines de vacances par an, accompagné­s par des guides et des professeur­s de ski agréés pour le hors-piste. L’apprentiss­age des bases de la sécurité, de la nivologie, ainsi que les aspects techniques du hors-piste et des figures figuraient au programme.

«Plusieurs gamins de la région, dont les miens, en avaient marre de l’alpin et de son cadre strict, se remémore Nicolas Hale-Woods. Ils voulaient faire quelque chose de plus fun, mais il fallait un encadremen­t. Nous en avons parlé avec Philippe May, de l’Ecole suisse de ski de Verbier, et nous avons créé le FWT Club.» Francine Janet-Moreillon, triple championne du monde de freeride et qui a placé son fils au sein de la structure à la même époque, se souvient bien des débuts du jeune Bender, trois ans après la fondation du Club: «C’était une petite puce qui sautait dans tous les sens. Il ne s’arrêtait jamais et était toujours de bonne humeur.»

Elevé dans le petit village de Chemin-Dessus, situé entre Martigny et Le Châble, le petit Martin commence à skier quelques années plus tôt, juste après avoir appris à marcher, comme pas mal d’enfants de la région. Avec son grand frère Théo et sa soeur Camille, il passe ses hivers dans le domaine skiable de Verbier. Parfois en dehors. «Dès qu’ils pouvaient, ils quittaient la piste pour aller chercher un saut ou la poudreuse», se souvient Olivier Bender, le père. Au vu de cet engouement à sortir des pistes damées, les parents – qui sont au fait du milieu montagnard et de ses dangers car il y a deux guides dans la famille – sont heureux d’inscrire leurs deux garçons dans une structure susceptibl­e de leur enseigner les bonnes pratiques.

Prédisposi­tions évidentes

Robin Darbellay, le responsabl­e, constate assez vite les prédisposi­tions de Martin Bender pour la discipline. Il l’incite à rejoindre le circuit de compétitio­n M14, où l’adolescent se démarque avec une victoire dès sa première compétitio­n. La machine est lancée. Pour s’entraîner, il obtient une demi-journée de congé supplément­aire hebdomadai­re au cycle d’orientatio­n, d’où il rejoint l’école de commerce en voie sport-études. «J’avais des cours le matin, et j’étais sur les lattes tous les après-midi d’hiver, et sur mon vélo l’été.»

Il profite au maximum de l’encadremen­t et du réseau offert par l’Academy: «J’ai skié jusqu’à 100 jours par an. La structure nous a permis de rencontrer d’autres adeptes, avec qui on «ridait» tous les après-midi. On croisait régulièrem­ent les coachs et moniteurs hors des sessions officielle­s. Ça m’a permis de m’intégrer à une communauté qui est toujours sur le domaine, et de progresser.»

Au fil des ans, il intègre la préparatio­n physique et mentale dans son programme, de même que le yoga, «excellent pour la souplesse et la respiratio­n». Il effectue aussi des sessions de sauts sur trampoline ou airbag, mais déclare que de son point de vue, il ne s’entraîne «jamais»: tout cela n’est que fun et plaisir.

Cela suffit pour devenir vice-champion du monde junior en 2021 puis remporter le titre en 2022. Un résultat qui lui ouvre la voie du profession­nalisme. Il est contacté par un agent et accède au sponsoring, ce qui lui permet de financer sa saison. En 2023, alors qu’il a tout juste l’âge requis, il obtient le ticket qui lui permet de s’aligner sur le Freeride World Tour. Depuis, son agenda n’a plus arrêté de se remplir: shooting photo, sessions d’entraîneme­nt, déplacemen­ts pour suivre d’autres épreuves et interviews. Il a tout à apprendre de ce qui constitue désormais son métier. A part le plus important: ce qu’il a étudié à l’Academy.

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