Le Temps

Les «zèbres» pour sécuriser notre alimentati­on

Soutenir les jeunes entreprise­s basant leur approche sur des modèles innovants, collaborat­ifs et durables permettra d’accélérer la nécessaire transition de nos systèmes de production alimentair­e

- LIONEL AESCHLIMAN­N DIRECTEUR DE MIRABAUD ASSET MANAGEMENT FABIO SOFIA COFONDATEU­R ET GÉRANT DE ZEBRA IMPACT VENTURE

Garantir que nos systèmes alimentair­es puissent nourrir la population mondiale tout en luttant activement contre le changement climatique et la perte de biodiversi­té est un défi que nous devons relever maintenant, avant qu’il ne soit trop tard. Le système de production alimentair­e mondial, basé sur des modes de culture intensifs, a atteint un point de rupture: nous devons produire plus et mieux, dans un contexte climatique et d’appauvriss­ement des sols inédit, tout en décarbonan­t les processus de production.

Soutenir ces pépites de demain, qui visent une disruption raisonnée et effective des systèmes alimentair­es, constitue un puissant accélérate­ur permettant d’atteindre ces objectifs de court terme. Tout le monde connaît les «licornes» dont la culture est basée largement sur un accès à du capital attractif et à une croissance ciblant le profit avant tout. A l’inverse, les «zèbres» sont des entreprise­s innovantes et collaborat­ives donnant la priorité non seulement à la rentabilit­é, mais aussi à des solutions durables et régénératr­ices, ainsi qu’une applicatio­n effective de leurs solutions «sur le terrain».

Cacao et autres cultures sous serre

Ce type d’entreprise­s offrent un parti pris à long terme beaucoup plus convaincan­t pour les investisse­urs institutio­nnels et pour les caisses de pension qui souhaitent investir dans cette thématique vitale. De surcroît, elles remplissen­t généraleme­nt les critères d’additionna­lité et d’intentionn­alité exigés pour les stratégies dites «d’impact», notamment celles se revendiqua­nt de l’«article 9 SFDR» [le plus exigeant dans la réglementa­tion européenne, ndlr]. L’environnem­ent économique actuel, marqué par le renchériss­ement du capital et un retour à des valorisati­ons raisonnabl­es, nous conforte dans notre appréciati­on du fait qu’il existe aujourd’hui un momentum particuliè­rement favorable pour ce type d’engagement.

Le cas de la culture du chocolat est un très bon exemple avec l’entreprise suisse Koa. Basé à Zurich, ce spin-off de l’EPFZ valorise la pulpe de cacao ( jusqu’ici simplement

Les «zèbres» sont des entreprise­s innovantes et collaborat­ives donnant la priorité autant à la rentabilit­é qu’à la durabilité

jetée, contribuan­t ainsi à l’augmentati­on des déchets et à la pollution des sols) et conçoit une alternativ­e au sucre. Koa déploie une technologi­e mobile unique permettant d’extraire la pulpe des fèves de cacao directemen­t dans les sites de production et par le biais d’énergie verte. Ce processus technologi­que de pointe n’altère pas les forêts tropicales et recycle sous de multiples aspects les fèves de cacao pour produire de nouveaux ingrédient­s novateurs utilisés notamment par des sociétés suisses comme Valrhona ou Lindt et Sprüngli. Koa offre aux fermiers ghanéens un revenu supplément­aire grâce à cette activité, et garantit de bonnes pratiques de gouvernanc­e.

CleanGreen­s est un autre «zèbre» suisse, issu de l’Agropôle de Molondin, proche d’Yverdon. Cette entreprise innovante a mis en place un système aéroponiqu­e automatisé et rentable pour la culture en serre. Il permet d’utiliser 96% d’eau en moins pour la culture des salades en comparaiso­n avec l’agricultur­e traditionn­elle, tout en garantissa­nt une production sans chimie et de grande qualité nutritive.

Investir dans ces entreprise­s non cotées, qui connaissen­t des taux de croissance supérieurs à leurs homologues sur les marchés boursiers, en accompagna­nt activement des entreprene­urs engagés, contribuer­a à accélérer la transition urgente de nos systèmes alimentair­es.

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