Le Temps

Le genevois Transmutex lève 21 millions de francs

La start-up planche sur un réacteur atomique au thorium qui générerait bien moins de déchets radioactif­s qu’une centrale à l’uranium

- RICHARD ÉTIENNE @rietienne

C’est une start-up genevoise qui pourrait faire du bruit. Transmutex, et ses savants issus du CERN, de l’EPFL et de l’Unige notamment, élaborent une technologi­e nucléaire qui serait plus sûre et qui générerait beaucoup moins de déchets radioactif­s que des centrales comme celles qui existent actuelleme­nt en Suisse. Elle ne sera pas opérationn­elle demain, mais une étape importante vers une éventuelle réalisatio­n a été franchie en ce début d’année.

Fondée en 2019 par Franklin Servan-Schreiber, un entreprene­ur français, Transmutex a annoncé hier avoir levé 21 millions de francs auprès de deux sociétés d’investisse­ment américaine­s, Union Square Ventures et Steel Atlas.

«Transmutex réinvente l’énergie nucléaire en concevant une technologi­e de réaction qui ouvrira une nouvelle ère d’énergie de base sans carbone, moins coûteuse et sans risque de proliférat­ion», a écrit l’entreprise dans un communiqué à cette occasion, hier.

La technologi­e sur laquelle elle travaille doit pouvoir permettre à un réacteur d’être arrêté en deux millisecon­des en cas de problème. Elle peut utiliser du thorium, un métal plus abondant que l’uranium et qui ne produit pas de plutonium, un métal associé aux bombes atomiques, ni d’autres déchets à vie longue.

«Et s’il s’avérait qu’il existe une approche permettant de résoudre les problèmes fondamenta­ux de sécurité, de coût et de déchets de longue durée qui ont entravé l’industrie nucléaire traditionn­elle? Une conception de réacteur dont la sécurité est garantie et qui peut réduire la radiotoxic­ité des déchets à vie longue de 300000 ans à 300 ans. C’est exactement ce que l’équipe de Transmutex a mis au point», affirme Albert Wenger, associé gérant d’Union Square Ventures, cité dans le communiqué de Transmutex.

Demande en hausse

La start-up indique que cette levée de fonds lui permettra de renforcer son équipe à Genève, qui emploie une vingtaine de personnes, et se dit en train d’ouvrir un nouveau centre de recherche hors de Suisse, sans préciser où. Quand nous avons rencontré pour la première fois son équipe, en 2021, Transmutex collaborai­t avec des institutio­ns de premier plan dans le monde, dont Rosatom, l’entreprise d’Etat russe spécialisé­e dans l’énergie nucléaire. Elle a dû couper les ponts depuis.

L’énergie nucléaire, décriée après les accidents de Tchernobyl et de Fukushima, suscite un regain d’intérêt avec la crise énergétiqu­e et les besoins de décarbonat­ion. Les prix de l’uranium, le métal qui fait tourner les réacteurs nucléaires actuelleme­nt, sont d’ailleurs en forte hausse.

Le GIEC a indiqué qu’il faudra jusqu’à cinq fois plus d’énergie nucléaire d’ici à 2050 pour répondre à la demande d’énergie propre. Durant la COP28, 22 pays se sont d’ailleurs engagés à tripler leur production d’électricit­é nucléaire. ■

Newspapers in French

Newspapers from Switzerland