Le genevois Transmutex lève 21 millions de francs
La start-up planche sur un réacteur atomique au thorium qui générerait bien moins de déchets radioactifs qu’une centrale à l’uranium
C’est une start-up genevoise qui pourrait faire du bruit. Transmutex, et ses savants issus du CERN, de l’EPFL et de l’Unige notamment, élaborent une technologie nucléaire qui serait plus sûre et qui générerait beaucoup moins de déchets radioactifs que des centrales comme celles qui existent actuellement en Suisse. Elle ne sera pas opérationnelle demain, mais une étape importante vers une éventuelle réalisation a été franchie en ce début d’année.
Fondée en 2019 par Franklin Servan-Schreiber, un entrepreneur français, Transmutex a annoncé hier avoir levé 21 millions de francs auprès de deux sociétés d’investissement américaines, Union Square Ventures et Steel Atlas.
«Transmutex réinvente l’énergie nucléaire en concevant une technologie de réaction qui ouvrira une nouvelle ère d’énergie de base sans carbone, moins coûteuse et sans risque de prolifération», a écrit l’entreprise dans un communiqué à cette occasion, hier.
La technologie sur laquelle elle travaille doit pouvoir permettre à un réacteur d’être arrêté en deux millisecondes en cas de problème. Elle peut utiliser du thorium, un métal plus abondant que l’uranium et qui ne produit pas de plutonium, un métal associé aux bombes atomiques, ni d’autres déchets à vie longue.
«Et s’il s’avérait qu’il existe une approche permettant de résoudre les problèmes fondamentaux de sécurité, de coût et de déchets de longue durée qui ont entravé l’industrie nucléaire traditionnelle? Une conception de réacteur dont la sécurité est garantie et qui peut réduire la radiotoxicité des déchets à vie longue de 300000 ans à 300 ans. C’est exactement ce que l’équipe de Transmutex a mis au point», affirme Albert Wenger, associé gérant d’Union Square Ventures, cité dans le communiqué de Transmutex.
Demande en hausse
La start-up indique que cette levée de fonds lui permettra de renforcer son équipe à Genève, qui emploie une vingtaine de personnes, et se dit en train d’ouvrir un nouveau centre de recherche hors de Suisse, sans préciser où. Quand nous avons rencontré pour la première fois son équipe, en 2021, Transmutex collaborait avec des institutions de premier plan dans le monde, dont Rosatom, l’entreprise d’Etat russe spécialisée dans l’énergie nucléaire. Elle a dû couper les ponts depuis.
L’énergie nucléaire, décriée après les accidents de Tchernobyl et de Fukushima, suscite un regain d’intérêt avec la crise énergétique et les besoins de décarbonation. Les prix de l’uranium, le métal qui fait tourner les réacteurs nucléaires actuellement, sont d’ailleurs en forte hausse.
Le GIEC a indiqué qu’il faudra jusqu’à cinq fois plus d’énergie nucléaire d’ici à 2050 pour répondre à la demande d’énergie propre. Durant la COP28, 22 pays se sont d’ailleurs engagés à tripler leur production d’électricité nucléaire. ■