Le Temps

Le conducteur Pierre Maudet est acquitté

Le Tribunal de police estime qu’il subsiste un doute suffisant sur l’existence d’une collision et que celui-ci doit profiter au prévenu. C’est probableme­nt la fin de cette histoire routière pour le nouveau ministre chargé des Mobilités

-

FATI MANSOUR @fatimansou­r XPierre Maudet a-t-il heurté l’arrière d’un véhicule? Et, si oui, s’est-il rendu compte de la collision avant de poursuivre son chemin sans remplir ses devoirs en cas d’accident, même très léger? La réponse du Tribunal de police à cette nouvelle (mini-)aventure judiciaire du conseiller d’Etat est tombée hier.

Pas convaincu par l’existence d’un accrochage, sur la base des éléments de ce maigre dossier, le président Yves Maurer-Cecchini a nourri un doute suffisant pour acquitter le ministre. «C’est un nonlieu pour une non-affaire. Je suis satisfait de ce verdict qui démontre que je n’ai jamais cherché à esquiver et à me soustraire à mes responsabi­lités», a déclaré le conseiller d’Etat à la sortie de l’audience.

Dans sa brève motivation orale, le tribunal a souligné les divergence­s entre les déclaratio­ns des deux automobili­stes, s’agissant de la densité du trafic et de l’intensité du choc. C’est le peu de compatibil­ité entre les traces constatées sur chacun des véhicules – celui de Pierre Maudet portant une marque très légère sur l’enseigne VW, et celui de l’autre conducteur étant bien plus abîmé – qui a principale­ment fait douter le juge.

«Peu crédible»

Rappelant les hésitation­s du policier venu témoigner à la fois d’une hauteur de marques qui concorde, mais aussi du très mauvais état du pare-chocs du supposé lésé, le tribunal estime qu’il n’est pas possible de retenir que ces dégâts ont bien été provoqués à l’occasion d’une collision avec le véhicule conduit par Pierre Maudet. «Il est peu crédible d’avoir un dommage d’une telle ampleur sur un véhicule et une simple marque sur l’autre», relève la décision, ce d’autant qu’ils roulaient assez vite selon la version du plaignant. Or, les constats «ne permettent pas de conclure à un choc d’une certaine intensité».

Certes, le tribunal s’interroge et ne reste pas insensible à l’appel passé à la police par l’autre conducteur. Cela ne suffit toutefois pas à pallier l’absence de preuves matérielle­s et à résoudre les problèmes de compatibil­ité des dégâts. A défaut d’autres éléments (témoins ou images de vidéosurve­illance) permettant d’établir que la collision a bien eu lieu, et puisque le doute doit profiter à l’accusé, le tribunal conclut qu’il n’y a pas matière à retenir une violation simple des règles de la circulatio­n routière. Ni, a fortiori, une violation des obligation­s en cas d’accident.

Aucun échange verbal

Rappelons que lors de l’audience, qui s’est tenue mardi dernier, Pierre Maudet, défendu par Me Yama Sangin, s’est dit certain de ne pas avoir percuté le véhicule qui le précédait du côté des

Acacias, ce 24 mars 2023, alors qu’il venait de quitter «une soirée de nature électorale». Il a également précisé n’avoir pas le souvenir d’un automobili­ste arrêté sur le bord de la route, ni remarqué une voiture qui le suivait, ni perçu la moindre manifestat­ion d’un problème quelconque. C’était avant de voir débarquer trois gendarmes chez lui, peu avant minuit, pour le faire souffler dans un test, inspecter la carrosseri­e, mesurer la hauteur d’une marque sur l’avant et évoquer une collision.

De son côté, l’autre conducteur s’est déclaré tout aussi convaincu d’avoir bien senti un choc. A la suite de cette secousse, il a expliqué s’être arrêté pour discuter avec le fautif, sans succès, avant de repartir et de tenter de le rattraper à un feu rouge pour lui parler. Il a finalement appelé la police en fournissan­t le numéro d’immatricul­ation, sans se douter qu’il s’agissait de Pierre Maudet et sans aucune intention de lui nuire. Il voulait simplement établir un constat.

S’agissant des faits, le tribunal a retenu que les deux conducteur­s se trouvaient bien sur les lieux ce soir-là. Ceux-ci n’ont échangé à aucun moment, le plaignant ayant lui-même déclaré avoir suivi en vain Pierre Maudet pour lui parler, sans jamais faire d’appel de phares. L’intéressé n’a pas constaté les dégâts sur son parechocs immédiatem­ent après avoir ressenti la secousse, mais seulement lorsqu’il s’est arrêté la seconde fois et qu’il a appelé la police.

C’est donc la fin de cette histoire routière pas tout à fait comme les autres, sauf si l’autorité de poursuite, qui avait infligé une amende de 2060 francs et maintenu son ordonnance, décide de faire appel. ■

«C’est un non-lieu pour une non-affaire» PIERRE MAUDET, CONSEILLER D’ÉTAT

 ?? ??

Newspapers in French

Newspapers from Switzerland