Le Temps

Pendant ce temps-là, grimace à Wall Street

La folie des SPAC a culminé en 2021 aux Etats-Unis, sur la base de promesses infondées et d’argent gratuit. Une ère désormais révolue

- S. RU

Le lancement de VT5 en Suisse, fin 2021, a pratiqueme­nt coïncidé avec la fin de la frénésie des SPAC aux Etats-Unis, qui avaient fait fureur à Wall Street durant la pandémie. Cette année-là avait marqué un record dans le nombre d’entrées en bourse de ces coquilles vides cherchant à acquérir des sociétés opérationn­elles: 613 SPAC avaient alors levé un total de 162 milliards de dollars. Pratiqueme­nt deux fois plus qu’en 2020 et dix fois plus que les années précédente­s.

Les SPAC sont également appelés «sociétés chèques en blanc» car ceux qui leur apportent des capitaux ne savent pas quelle entreprise sera acquise et n’ont même aucune garantie qu’une acquisitio­n – «business combinatio­n» en jargon SPAC – sera finalement conclue. La popularité des SPAC s’explique peut-être par la possibilit­é qu’avaient leurs promoteurs à faire miroiter des potentiels de gains élevés pour les sociétés qu’ils comptaient acquérir, sans devoir véritablem­ent justifier leurs projection­s ni risquer de devoir rendre des comptes si elles ne se matérialis­aient pas.

Puis le soufflé est retombé: 86 SPAC ont recueilli 13,5 milliards en 2022, puis 31 de ces structures ont été lancées en 2023 pour 3,8 milliards levés et… une seule en 2024 pour le moment, qui a attiré 50 millions.

Finies les paroles en l’air

Sur les 1367 SPAC lancés à Wall Street en dix ans, 678 ont réalisé une combinaiso­n, pour un total de 163 milliards de dollars, 150 ont annoncé avoir trouvé une société à acheter et 100 cherchent encore leur cible.

Surtout, environ un tiers des SPAC lancés sur cette période ont fini par être liquidés, faute d’avoir réussi à prendre le contrôle d’une entreprise.

L’avenir ne paraît guère plus clément. Le 24 janvier, la SEC a réduit la protection dont bénéficiai­ent les sponsors de SPAC ayant formulé des projection­s trop optimistes, dans une nouvelle réglementa­tion qui lutte aussi contre les conflits d’intérêts. Les promoteurs de ces structures perdent leur mise si aucune acquisitio­n n’est effectuée dans les deux ans, ce qui peut les pousser à acquérir n’importe quelle société, plutôt que la meilleure entreprise possible. Les investisse­urs ayant succombé à la vague des SPAC ont-ils fait une affaire? Les actions d’un SPAC sont toujours émises à 10 dollars la pièce. Sur 440 de ces structures précédemme­nt cotées aux EtatsUnis, près de 200 affichent un cours boursier inférieur à 2 dollars, selon Bloomberg.

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