Une 13e rente AVS nécessaire et possible
Vivre avec 2000 francs par mois, ça vous donne envie? En Suisse, la question est presque rhétorique. C’est pourtant ce qui est exigé d’une part importante de retraitées et retraités! Le constat est là: après avoir travaillé toute leur vie et contribué au développement du pays, une personne sur dix, et une femme sur six, est pauvre au moment de la retraite. S’ajoutent à cela les ménages qui ne frisent pas la pauvreté mais pour qui la situation est de plus en plus difficile.
Que fait le monde politique pour remédier à cette situation? D’un côté, une initiative populaire propose un projet très simple: verser une treizième rente AVS, comme une majorité d’entre nous reçoit un treizième salaire. De l’autre côté, les opposants à l’initiative ne proposent pas de solution aux difficultés grandissantes des personnes à la retraite. Au parlement, la majorité bourgeoise ne fait rien pour améliorer leurs conditions de vie. Au contraire, elle noie le poisson avec des contrevérités sur l’initiative. Détricotons-les!
L’idée qu’une 13e rente donnerait de l’argent aux ménages qui n’en ont pas besoin est la première de ces techniques d’enfumage. Dans le respect du système de l’AVS, système imaginé et voté par ceux qui le combattent aujourd’hui, l’initiative applique en effet son principe fondateur: tout le monde cotise, donc tout le monde reçoit. Les super-riches n’ont pas non plus besoin de la 12e, de la 11e, de la 10e rente… Mais le principe de redistribution de l’AVS doit être respecté, l’AVS n’est pas l’aide sociale. D’autant plus que les aides ciblées n’arrivent pas non plus, au contraire: des milliers de bénéficiaires des prestations complémentaires viennent de voir leurs revenus baisser ou même être supprimés.
AVS13 répond de plus à une nouvelle réalité: les classes moyennes commencent aussi à avoir des retraites difficiles. La valeur des rentes LPP (deuxième pilier) baisse et la majorité des travailleuses et travailleurs n’ont pas ou que marginalement accès à un troisième pilier. Les loyers, les primes d’assurance maladie, le prix des biens de consommation flambent, sans qu’aucune adaptation des rentes au renchérissement ne soit acceptée par la majorité bourgeoise du parlement. D’ailleurs, à son lancement, l’initiative AVS13 avait pour but d’augmenter les rentes. Quatre ans plus tard, son adoption ne permettrait que de compenser ce renchérissement.
Les opposants agitent aussi une supposée guerre des générations. Augmenter les rentes serait faire payer aux jeunes un prix trop élevé. Mais les jeunes savent compter: avec l’incertitude entourant la LPP, le premier pilier reste l’assurance sociale la plus accessible, la plus rémunératrice et la plus solide. Renforcer l’AVS nous donne l’assurance d’avoir une retraite digne lorsque nous arriverons aussi à la retraite. De plus, le système redistributif de l’AVS fait que 9 personnes sur 10 reçoivent au moment de la retraite plus qu’elles n’ont cotisé. Ce ne sont donc pas les jeunes qui paient pour une 13e rente, ce sont les ultra-riches. Pour finir, de nombreux actifs doivent aujourd’hui pallier les difficultés financières de leurs parents à la retraite: AVS13 est une garantie de liberté pour ces personnes et de dignité pour leurs parents.
Enfin, la Suisse n’aurait pas les moyens de garantir la dignité de sa population au moment de la retraite. Quels sont les faits? Malgré les scénarios catastrophes brandis depuis sa création, l’AVS n’est toujours pas en faillite, au contraire! Au cours des prochaines années, l’AVS enregistrera un excédent de près de 3 milliards de francs par an. D’ici à 2030, les réserves de l’AVS s’élèveront à presque 70 milliards de francs. Nous avons donc les moyens de cette réforme, qui coûterait environ 4,1 milliards.
Si à l’avenir des moyens supplémentaires étaient nécessaires, une augmentation des cotisations salariales de 0,4% suffirait. Un petit investissement pour une augmentation de rente de plusieurs centaines de francs: l’AVS est l’assurance sociale avec le meilleur rapport coût-bénéfice. Un treizième versement est donc non seulement nécessaire, il est aussi possible.
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