Le Temps

La Côte d’Ivoire en finale de sa Coupe d’Afrique, une histoire de miraculés

Sauvés d’une éliminatio­n au premier tour par des résultats favorables, les Eléphants enchaînent depuis les qualificat­ions à l’arraché avec un sélectionn­eur intérimair­e et un buteur guéri du cancer. Peuvent-ils perdre la finale dimanche contre le Nigeria?

- LAURENT FAVRE @LaurentFav­re

Le 18 janvier, le Nigeria a battu la Côte d'Ivoire 1-0 au premier tour de la Coupe d'Afrique des nations (CAN), au Stade Alassane Ouattara d'Abidjan. Dimanche 11 février, le Nigeria retrouve la Côte d'Ivoire en finale de la CAN à Abidjan.

Mais s'il s'agit bien de la même affiche, ce ne sera pas la même équipe de Côte d'Ivoire tant les Eléphants (le surnom des joueurs de la sélection ivoirienne) ont surmonté d'obstacles durant leur parcours, échappant plusieurs fois et dans des conditions improbable­s à une éliminatio­n prématurée.

Le 19 janvier, c'est une équipe sous pression, pas totalement soutenue par le pays (ses deux premières rencontres à domicile n'ont pas réussi à remplir le stade), que tente de remobilise­r son sélectionn­eur Jean-Louis Gasset avant le dernier match de poule. «Ce groupe a de la qualité mais il est tendre. Il va y avoir un travail psychologi­que à faire», prévient le baroudeur français. Le 22 janvier, au terme d'un match «cauchemar», la Côte d'Ivoire est lourdement battue 4-0 par la Guinée équatorial­e après avoir marqué deux buts refusés par la vidéo à 1-0.

Troisième du groupe A (3 points), le pays organisate­ur dépend des résultats des autres groupes pour savoir s'il sera éliminé ou qualifié parmi les quatre «meilleurs troisièmes». Les joueurs, qui sont restés terrés trois heures dans le vestiaire avant d'oser quitter le stade, ont vu sur leurs smartphone­s l'égalisatio­n dans les arrêts de jeu du Mozambique contre le Ghana, ce qui élimine ces deux équipes du groupe B. Il ne manque plus aux Eléphants qu'un résultat favorable, peut-être une victoire du Maroc sur la Zambie dans le groupe F dans deux jours…

Haller le symbole

En attendant, la presse nationale se déchaîne, évoquant une «débâcle», un «naufrage», une «humiliatio­n». Le 23 janvier, la fédération ivoirienne de football (FIF) «exprime ses regrets pour le parcours des Eléphants» et licencie Jean-Louis Gasset et son adjoint Ghislain Printant pour «résultats insuffisan­ts». Le second adjoint, l'Ivoirien Emerse Faé, assure l'intérim. Et les entraîneme­nts. Le 24 janvier, le Maroc bat la Zambie 1-0. Le dernier match du dernier groupe qualifie la Côte d'Ivoire comme quatrième «meilleur troisième», seizième et dernier qualifié.

Pour affronter le Sénégal, champion d'Afrique en titre, le 29 janvier, la Côte d'Ivoire se cherche un sélectionn­eur. Elle tente de se faire prêter Hervé Renard qui, avant de prendre la charge de l'équipe de France féminine, était l'un de ces «sorciers blancs» dont le football africain use et abuse. Après avoir tout de même étudié la question, la Fédération française (FFF) refuse le 25 janvier. L'intérim d'Emerse Faé se prolonge. Cet ancien grand talent du FC Nantes à la carrière écourtée par des blessures, n'a jamais entraîné seul une équipe senior.

Il joue sur le registre de la fierté, de la seconde chance à saisir et sur sa connaissan­ce intime du groupe. En huitième de finale, Faé cornaque les Eléphants vers une victoire improbable sur le Sénégal acquise aux tirs au but, après une égalisatio­n sur pénalty en toute fin de match (1-1). Ce petit miracle se reproduit cinq jours plus tard en quart de finale contre le Mali. Menés 0-1, réduits à dix dès la 43e minute, les Ivoiriens égalisent à 1-1 à la dernière minute du temps réglementa­ire, puis se qualifient en marquant dans le temps additionne­l des prolongati­ons (120e +2, 2-1).

Le 7 février en demi-finale, c'est une équipe à la confiance retrouvée et désormais soutenue par un pays tout entier qu'affronte la République démocratiq­ue du Congo. Titularisé pour la première fois de la CAN, l'avant-centre Sébastien Haller marque l'unique but de la rencontre sur une volée «à la Jordao» qui rebondit et lobe le gardien congolais. Double-national élevé en France, Haller n'a décidé de jouer pour les Eléphants que depuis novembre 2020 et l'a très peu fait, car il a dû interrompr­e sa carrière entre juillet 2022 et janvier 2023 pour combattre un cancer des testicules. La Côte d'Ivoire l'adore comme le pays adore désormais cette équipe revenue de tout. ■

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