L’affaire du Travys rebondira aux parlements fédéral et vaudois
L’UDC Vaud annonce que deux de ses élus interviendront à Berne et à Lausanne pour obtenir des explications. A gauche, on condamne l’attitude de l’UDC, jugée stigmatisante envers les étrangers
Les réactions politiques ne se sont pas fait attendre. La prise d’otages dans le Travys (Transports Vallée de Joux Yverdon-les-Bains Sainte-Croix) qui a tenu en haleine le Nord vaudois ce jeudi soir aura des répercussions parlementaires. L’UDC vaudoise a annoncé que deux de ses élus interviendront sous la coupole fédérale, mais aussi auprès du parlement cantonal. Le parti estime que la population «est en droit de connaître le profil de personnes que nous accueillons et leur dangerosité». A gauche, le Parti socialiste fustige une «réaction xénophobe».
Le conseiller national et municipal UDC à Sainte-Croix, Yvan Pahud, déposera à Berne une interpellation lors de la prochaine session parlementaire pour demander des explications au Conseil fédéral sur le parcours du preneur d’otages et des mesures mises en oeuvre pour encadrer ces requérants. «En tant que Sainte-Crix, je me sens évidemment concerné, car même si l’assaillant n’était visiblement pas installé ici, je ne peux pas m’empêcher de faire le lien avec la problématique de l’accueil dans notre petite région du balcon du JuraNord vaudois où nous comptons trois centres de requérants.» A Lausanne, c’est le président du groupe des députés UDC, Cédric Weissert, qui interviendra lors de la prochaine session du Grand Conseil, indique le parti dans un communiqué publié vendredi en fin de matinée.
«Il est nécessaire de rappeler au Conseil d’Etat qu’il doit cesser d’être le service après-vente d’une politique fédérale en matière d’asile chaotique et anxiogène. Vu que Berne ne veut pas entendre raison, c’est aux cantons de dire stop», appuie Kevin Grangier, le président de l’UDC Vaud, estimant que sa formation «ne doit plus être seule à prêcher dans le désert, les cantons doivent aussi tirer la sonnette d’alarme».
Le «petit train de campagne» reliant Yverdon-les-Bains à Sainte-Croix, Kevin Grangier l’a souvent emprunté au début des années 2000 pour se rendre à l’école technique de Sainte-Croix. Une réalité qui donne une tonalité différente à l’événement survenu sur cette ligne. Mais derrière cette «affaire affreuse», se cache, selon le président UDC, une «politique fédérale inhumaine pour les requérants d’asile». Il détaille: «On leur laisse espérer un avenir meilleur en Suisse et, une fois ici, pris en étau par leur nombre et de faux espoirs, beaucoup n’ont d’autre choix que de sombrer dans des actions criminelles qui peuvent être très graves, comme cette prise d’otages. Il n’est pas normal que des policiers, dont il faut saluer le travail remarquable, doivent risquer leur vie et que la population doive redouter d’être prise en otage par des gens qui bénéficient de notre hospitalité.» Car, pour Kevin Grangier, l’acte de jeudi soir vient s’ajouter «à une longue liste d’infractions, de crimes et de délits, dont la cause est à chercher du côté des abus de la politique d’asile».
«Réaction xénophobe de l’UDC»
A l’opposé de l’échiquier politique, le président du Parti socialiste vaudois Romain Pilloud dénonce une «réaction xénophobe de l’UDC», qui le choque. «L’UDC se sert d’un cas individuel pour extrapoler, faire des généralités et expliquer que les étrangers sont des criminels. Cette attitude de faire des liens entre les étrangers et le fait d’être un criminel rend la population méfiante à l’encontre de tous les étrangers, dont la quasi-totalité n’ont rien à se reprocher.» Romain Pilloud précise que les études démontrent que la probabilité de perpétrer un crime dépend notamment de l’âge, du niveau de formation et de la situation socioéconomique des personnes. «Les jeunes hommes peu formés et pauvres sont susceptibles de commettre plus de délits, or on en retrouve plus au sein de la population étrangère», souligne-t-il.
«Il faut arrêter de jouer au chat et à la souris. Il faut renvoyer les requérants d’asile qui sont des délinquants» PASCAL BROULIS, CONSEILLER AUX ÉTATS (PLR/VD)
En pensée avec les victimes de la prise d’otages, le président socialiste reconnaît toutefois que le traitement des personnes déposant une demande d’asile est «un enjeu énorme, notamment en matière de répartition intracantonale». Et Romain Pilloud de rappeler que, dans le canton de Vaud, «la majorité des milieux politiques sont favorables à une meilleure répartition sur le territoire, afin d’éviter de loger les requérants d’asile dans des grands centres fermés et de pouvoir ainsi mieux s’en occuper et mieux les accompagner». Enfant de Sainte-Croix, Pascal Broulis a, tout d’abord, une pensée pour les otages. Lui aussi connaît très bien ce train qui «relie le haut et le bas» et dans lequel a eu lieu cet événement. «Il nous montre que nous ne sommes à l’abri de rien, indique le conseiller aux Etats PLR. Il soulève également la question du renvoi des requérants d’asile qui sont des délinquants.» Et pour Pascal Broulis, la réponse est simple: «Il faut arrêter de jouer au chat et à la souris avec eux. Il faut les renvoyer.» Mais l’élu libéral-radical insiste sur le fait qu’il s’agit de cas marginaux. Il préfère remercier et féliciter les forces de l’ordre, en soulignant la parfaite réaction de la police vaudoise et de son homologue genevoise, dont la collaboration démontre «que la coordination intercantonale a fonctionné».
Conseiller fédéral chargé du Département fédéral de justice et police, Beat Jans salue aussi l’intervention policière. Sur les réseaux sociaux, ce vendredi, il indiquait avoir «téléphoné aux forces de l’ordre mobilisées» et les avoir «remerciées de leur intervention». Pour le socialiste, «la population a le droit de vivre en sécurité». Il précise que le Secrétariat d’Etat aux migrations «va analyser ce cas et les conséquences éventuelles avec les cantons concernés». ■