Pour les Iraniens, un difficile refuge
La Suisse octroie moins souvent l’asile aux Iraniens, en comparaison avec les ressortissants d’Afghanistan ou d’Erythrée. Sans doute parce que les récentes évolutions politiques dans le pays ne sont pas considérées comme une situation de violence généralisée par la Confédération
Le preneur d’otage du train régional qui circulait entre Yverdon et Sainte-Croix jeudi soir était un demandeur d’asile de nationalité iranienne de 32 ans, dont le dossier était attribué à Genève, précise la police cantonale via un communiqué vendredi. On en sait aussi davantage sur les motivations de l’assaillant. Son geste serait lié «à ses conditions de requérant d’asile, ainsi qu’à sa volonté insistante d’avoir des contacts avec une collaboratrice d’un centre de requérants d’asile. La police avait d’ailleurs dû intervenir à plusieurs reprises à cause de son comportement», précisent les autorités vaudoises.
Dans une vidéo filmée par l’un des passagers pris en otage, qui circule en ligne, l’homme exprimait dans un discours décousu ses difficultés en Suisse et disait vouloir rejoindre la Grande-Bretagne. L’enquête se poursuit sous la direction du Ministère public vaudois. Elle vise notamment à préciser les motivations du preneur d’otage.
Ces dernières années, les demandes d’asile de ressortissants iraniens ont augmenté pour se placer au neuvième rang des demandes de toutes les nationalités confondues. En effet, sur les 28 000 demandes enregistrées pendant les onze premiers mois de l’année 2023, 538 sont celles d’Iraniens ayant fui leur pays. Et si le taux de protection s’élève à 37,6%, ils ne sont que 20% à obtenir un permis B ou le statut de réfugiés.
Les autres ne sont autorisés à rester en Suisse que de manière provisoire, via un permis F. «Ce taux de reconnaissance, plus bas que pour des pays comme l’Afghanistan ou l’Erythrée, peut s’expliquer par le fait que les récentes évolutions politiques dans le pays ne sont pas considérées comme une situation de violence généralisée par la Suisse, explique Vincent Bürgy, le porte-parole du HCR, l’agence des Nations unies pour les réfugiés pour la Suisse et le Lichtenstein. De son côté, le
Ces dernières années, les demandes d’asile de ressortissants iraniens ont augmenté
Secrétariat d’Etat aux migrations (SEM) précise qu’il n’y a jamais eu de procédure facilitée pour la protection des Iraniens en lien avec la répression des manifestations de 2009, 2018 et 2022.
Participer à une manif n’est pas un motif d’asile
Malgré la répression de Téhéran pour contrer la vague de manifestations qui a secoué le pays à l’automne 2022 après la mort de la jeune kurde Mahsa Amini pour un hijab mal mis, la Suisse n’a pas stoppé les renvois de demandeurs d’asile déboutés vers l’Iran. Quant à ceux qui seraient arrivés en Suisse à ce moment-là, leur participation à une manifestation n’est pas un motif suffisant pour obtenir le statut de réfugié, selon la jurisprudence du Tribunal fédéral. «En Suisse, l’asile n’est octroyé qu’aux personnes dont l’engagement se démarque des activités générales du reste de la population et est considéré comme une opposition sérieuse et dangereuse par le régime, explique l’Organisation suisse d’aide aux réfugiés (OSAR). Tant les personnes qui s’engagent sur le territoire iranien qu’en exil sont concernées.»
Après examen individuel, les autorités suisses procèdent donc toujours à des retours vers Téhéran. Le HCR précise qu’il ne déconseille pas toujours ce type de renvoi, mais demande aux pays une réelle évaluation individuelle des risques qu’engendrera un potentiel retour. Le HCR n’a pas de position ou d’évaluation spécifique en ce qui concerne les retours vers l’Iran. En général, l’organisation ne publie pas de positions pour tous les pays d’origine, mais se concentre sur les Etats d’où proviennent un nombre significatif de demandeurs d’asile ou vers lesquels des mouvements de retour importants sont enregistrés.
L’OSAR indique également de son côté, que «les demandes déposées par des personnes converties au christianisme sont souvent rejetées en Suisse, au motif qu’elles pourraient continuer à pratiquer leur religion de manière privée en Iran».■