Guide pratique dans la jungle de l’IA
Google a renommé son chatbot Bard, basé sur l’intelligence artificielle, en Gemini. La multinationale a également lancé de nouveaux abonnements payants qui ressemblent à ceux de Microsoft et OpenAI. On fait le point
Des services qui évoluent en permanence, qui changent de nom et qui, en plus, deviennent en partie payants: le marché de l'intelligence artificielle (IA) devient une véritable jungle. Pour les consommateurs, s'y retrouver parmi cette multitude d'offres devient extraordinairement difficile. La situation est venue se complexifier un peu plus avec l'annonce, ce jeudi, de nouveaux services de la part de Google, qui non seulement rebaptise son service Bard en Gemini, mais qui en plus lance des abonnements payants. Voici l'essentiel à savoir pour être à jour dans cet univers en perpétuel mouvement.
Qu’a annoncé Google?
Souvenez-vous: en mars 2023, quatre mois après l'arrivée de ChatGPT, Google répliquait en lançant Bard, son agent conversationnel destiné à concurrencer le service d'OpenAI. Bard proposait jusqu'à présent à peu près les mêmes fonctions que ChatGPT: réponse à des questions, création de texte, analyse de document, génération de code informatique ou encore coaching personnalisé. Désormais, le nom du produit change: Bard, très peu connu du grand public, est remplacé par Gemini, qui est en fait le modèle sur lequel était basé le chatbot. Le service Duet AI, qui permettait d'utiliser de l'IA au sein de Gmail, Docs ou encore Sheets, est aussi remplacé par Gemini.
Mais il n'y a pas qu'un changement de nom. Google propose aussi désormais un service payant, appelé Gemini Advanced, plus performant, offrant des réponses plus détaillées, utilisant l'historique et capable, toujours selon Google, de travailler sur des projets complexes. Il faudra débourser pour cela 19,99 dollars par mois pour obtenir l'abonnement «AI Premium», qui donne aussi droit à un espace de stockage en ligne de 2 To ou encore la possibilité d'utiliser Gemini dans la suite bureautique de Google.
Comment comparer Gemini aux solutions de Microsoft et OpenAI?
Les trois sociétés suivent la même trajectoire: elles fusionnent leurs services pour ne proposer qu'un seul point d'entrée à l'utilisateur. Depuis peu, ChatGPT intègre Dall-E, le générateur d'images d'OpenAI. Il y a une semaine, ce qui s'appelait encore Bard proposait lui aussi un générateur d'images (pas encore disponible en Suisse). Et quasiment depuis ses débuts, le moteur de recherche Bing de Microsoft permet aussi de créer des images de synthèse.
Des stratégies similaires, pour des produits très proches en termes de qualité. Difficile de différencier les résultats de Gemini, ChatGPT et Bing, c'est à chaque utilisateur de se faire son opinion. Chaque société y va de ses propos dithyrambiques, à prendre avec prudence, d'autant que des «hallucinations» (les erreurs) sont toujours présentes.
La recherche traditionnelle via Google va-t-elle disparaître?
Il y aura peut-être des évolutions, estime Olivier Duffez, expert en optimisation pour les moteurs de recherche (SEO). Contacté par Le Temps, il estime que «la jeune génération, qui ne voit pas toutes les limitations de l'IA générative de ChatGPT, pense pouvoir faire ses recherches avec. Ou bien avec TikTok. A force, cela peut contribuer à faire baisser la part de marché de Google, voire fragiliser son modèle et ses revenus futurs». Mais Olivier Duffez constate aussi que «les gens semblent encore utiliser Google presque autant qu'avant. S'ils se rendent compte qu'ils disposent chez Google d'un équivalent à ChatGPT, éventuellement meilleur et gratuit, alors ils l'utiliseront. Dit autrement, je ne suis pas persuadé que ChatGPT soit une menace si énorme que ça pour Google.»
Selon l'expert, «on va de plus en plus discuter avec Google (ou Bing). On va quitter progressivement le modèle historique «je fais une recherche, Google m'envoie des résultats, je clique et consulte des sites». On va faire des allers-retours, ou voir bien plus de résultats avant de finir sur un site, car on aura précisé et affiné notre recherche.»
Comment vont évoluer ces services?
Ils seront plus personnalisés, plus précis, mais permettront aussi davantage d'interactions. Sundar Pichai, directeur de Google, interrogé par le site spécialisé Wired, aime apparemment beaucoup le mot «multimodal» pour dire que Gemini a été nourri par du texte, des images, des sons et du code. Et que ce n'est qu'un début. «C'est ainsi que fonctionne l'esprit humain, on est constamment à la recherche de choses et on a un réel désir de se connecter au monde que l'on voit», affirme Sundar Pichai. «C'est pourquoi nous avons créé Google Lens [pour la recherche visuelle]. Avec Gemini, qui est «nativement multimodal, vous pouvez insérer des images et commencer à lui poser des questions. C'est cet aperçu de l'avenir qui fait toute la différence», ajoute le directeur de Google.
«Les publicités nous permettent de proposer des produits à un plus grand nombre de personnes» SUNDAR PICHAI, DIRECTEUR DE GOOGLE
Y aura-t-il encore des services gratuits?
Microsoft (avec son assistant Copilot au sein de sa suite bureautique Microsoft 365), Google avec la version Advanced de Gemini et OpenAI avec l'abonnement Plus proposent désormais tous des versions payantes de leurs services d'IA. Avec un prix comparable, autour des 20 dollars. «Les publicités nous permettent de proposer des produits à un plus grand nombre de personnes, mais dans certains cas, les abonnements permettront aux gens d'avoir une expérience différente», affirme Sundar Pichai. Des services basiques gratuits pour tous et des services premium pour les utilisateurs exigeants, c'est la nouvelle norme. Car il faut bien, que ces sociétés qui dépensent des milliards dans les puces pour faire tourner l'IA, tentent de rentabiliser ces investissements.
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