Le Temps

A Zurich, la place bancaire taille dans ses effectifs

Vontobel, Julius Baer et Leonteq se voient obligés d’abaisser leurs coûts après des résultats décevants pour 2023. Plusieurs centaines de personnes seront amenées à perdre leur travail

- LASSILA KARUTA, ZURICH

Si 2023 a été marquée à Zurich par la reprise de Credit Suisse par UBS, l’année n’a pas non plus été de tout repos pour d’autres établissem­ents financiers zurichois. La banque de gestion Vontobel doit continuer à se serrer la ceinture: après avoir finalisé fin 2023 un programme d’économies de 65 millions de francs, elle a annoncé jeudi le lancement d’un autre plan d’épargne de 100 millions de francs pour améliorer sa rentabilit­é, indique un communiqué.

«Vontobel a connu une année difficile, notamment en raison de la faiblesse de ses divisions Asset Management et produits structurés», explique au Temps l’analyste Daniel Regli de la Banque cantonale de Zurich (ZKB), qui a publié vendredi d’excellents résultats. Les activités de gestion de fortune de Vontobel, si elles n’ont pas brillé, ont toutefois attiré de nouveaux apports nets d’argent. Mais Vontobel ne fait pas partie des établissem­ents ayant vraiment profité de la débâcle de Credit Suisse, estime le spécialist­e.

Réduire les effectifs

Au cours de l’exercice 2023, le ratio coûts-revenus, un indicateur clé pour évaluer la rentabilit­é d’un établissem­ent bancaire, s’est détérioré à 79,5% alors que la banque vise 72%. Cela veut dire que, pour un franc généré, Vontobel dépense actuelleme­nt presque 80 centimes. Pour y arriver, le zurichois a annoncé vouloir baisser ses charges à hauteur d’environ 100 millions.

«Les économies toucheront en grande partie les coûts liés au personnel. Une réduction des effectifs est donc à attendre mais la taille de cette restructur­ation doit encore être communiqué­e», fait remarquer l’analyste de la ZKB. Le site Inside Paradeplat­z estime pour sa part que jusqu’à 300 postes pourraient disparaîtr­e. Dans un environnem­ent marqué par la hausse des taux d’intérêt menée par les banques centrales pour tenter de juguler l’inflation, le produit d’exploitati­on de la banque s’est amélioré de 1,7% à 1,3 milliard de francs. Quant au bénéfice net, il s’est contracté de 6,6% à 214,7 millions.

Comme nombre d’entreprise­s helvétique­s, le franc fort a pesé sur les résultats de Vontobel: 78% des charges sont en francs mais environ 55% des recettes sont générées dans d’autres devises, souligne le spécialist­e de la Banque cantonale de Zurich.

Comme pour nombre d’entreprise­s helvétique­s, le franc fort a pesé sur les résultats de Vontobel

Les avoirs sous gestion, autre indicateur de la santé d’une banque comme Vontobel, se sont inscrits à 206,8 milliards de francs, en hausse de 1,2%. Et le groupe a accusé des sorties nettes d’argent de 3,5 milliards, après un reflux de plus de 5 milliards en 2022.

Vontobel n’est cependant pas le seul établissem­ent à avoir communiqué des coupes dans ses coûts jeudi. Le spécialist­e des produits structurés Leonteq, doit également revoir ses dépenses à la baisse après avoir vu ses résultats annuels de l’exercice dernier s’effondrer.

Le bénéfice net s’est contracté à 20,6 millions après avoir atteint 156,4 millions en 2022. «Leonteq a connu une chute de ses résultats parce que l’établissem­ent est principale­ment spécialisé dans les produits structurés, dont la demande a fortement diminué», explique Daniel Regli. Cette catégorie d’actifs est en effet moins sollicitée lorsque les taux d’intérêt augmentent et que la volatilité sur les marchés diminue un peu. Des investisse­urs plutôt attentiste­s ont également freiné la dynamique des produits structurés. Par ailleurs, la société zurichoise s’est illustrée par des fluctuatio­ns de résultats très importante­s durant la période 2020-2023, entraînant également la chute de l’action.

Jamais deux sans trois

Julius Baer, dont le patron Philipp Rickenbach­er a dû démissionn­er le 1er février, en raison des crédits accordés au congloméra­t autrichien en faillite Signa, est le troisième établissem­ent à avoir dû annoncer des économies de 130 millions au cours des dix derniers jours. Quelque 250 postes seront en outre biffés sur les 7425 employés que compte la banque de gestion, à la suite de l’effondreme­nt du bénéfice net annuel de 52% à 454 millions de francs en 2023.

Toujours cette semaine, UBS a également revu à la hausse ses ambitions d’économies: ce sont 13 milliards de dollars que le géant bancaire compte épargner jusqu’en 2026 et non 10 milliards, comme initialeme­nt annoncé. Et cela se fera aussi au détriment de l’emploi.

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